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Animateur de radio bénévole depuis 7 ans sur Radio Judaïca STRASBOURG de deux émissions de jazz et musiques traditionnelles où je présente les concerts en région, après des études de lettres menées jusqu'à un DEA, je n'ai cependant jamais trouvé d'emploi correspondant à ma culture tant littéraire que musicale et à mes capacités rédactionnelles pourtant polyvalentes car souvent considéré comme sur diplômé et sous expérimenté. Par ce blog, je désirerais échanger avec d'autres dans le même cas nos expériences personnelles de sorte à nous enrichir mutuellement d'idées auxquelles nous n'aurions pas pensé nous-mêmes.

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MUSIQUES TRADITIONNELLES

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mercredi, novembre 21 2007

BILLY'S BAND A PÔLE SUD POUR LES NUITS EUROPEENNES

En deuxième partie de Wameedd, plus énergique, un groupe de cabaret russe et rock, "The Billy'sBand", mené par Billy Novik. En 1999, le contrebassiste russe Billy Novik découvre l'enfant terrible du cabaret rock américain à la voix cassée mais néanmoins émouvante. "The Billy's Band" reprend certaines de ses chansons en anglais ou en russe, et interprète des compositions.

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Dès l'arrivée du groupe, leurs manteaux loqueteux, élimés ou troués, craquant sur les coutures font ressembler les musiciens au comédiens d'un cabaret rock assumé destroy. Outre Billy Novik à la contrebasse et au chant (voix pas aussi cassée et lyrique que celle de son idole Tom Waits mais bien imitée tout de même), il y a Anton Mathesius à l'accordéon, darbouka et choeurs, un certain Mikhaïl "Gipsy" au saxophone et cowbell jouée de façon originale, sur la cloche ET DANS la cloche ce qui est moins commun, dont ce surnom, sa liberté mélodique allant jusqu'au free et son talent pourraient bien convenir à un musicien tzigane russe, enfin un certain "Regik" à la guitare, cymbales et choeur dans l'aïgu à la coupe afro frisée rappelant celle de Jimi Hendrix, qui semble être le benjamin et l'électron libre et l'élément le plus rock du groupe.

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Côté reprises de Tom Waits, elles restent très personnelles, même en anglais, ne serait-ce que par l'humour de Billy Novik, introduisant "Clap Hands" (danse au rythme déjanté de "Rain Dogs", premier album de la seconde période de Tom Waits dépassant l'idiome du chanteur Jazz Blues de ses débuts avec Marc Ribot à la guitare) par un histoire tragi-comique en anglais avouée pas complètement véridique le faisant naître dans un taxi New-Yorkais et obligé de trouver un travail, acceptant une place de "coordinateur entre mères et enfants", et se faisant renvoyer pour des raisons qui lui paraissent encore évidentes. Derrière les musiciens, sur un écran, Tom Waits en personne avance en titubant dans un tunnel, déformé monstrueusement par la prise de vue aux lumières stromboscopiques... Une autre reprise de Tom Waits fut introduite "for losers only", elle aussi tragi-comique, sur un rythme cabaret jazzy, l'écran montre des sourires et boîtes de soupe pop et kitsch à la Warhol, des bilets de banque, et pour terminer un immense sourire final. Toujours de Waits, la chanson qui suit décrit ce qui peut arriver aux enfants qui veulent devenir des stars de cinéma. Billy Novik y imite d'une voix de fausset la fillette ou sa mère, tandis que l'écran montre des démons poilus et des loups-garous extraits de vieux films d'horreur en noir et blanc, ou un adolescent alcoolique buvant du vin à la bouteille dans la rue, le saxo crie, le guitariste, aux cymbales, rythme une fanfare funèbre, et tout se termine sur l'écran par une tête de mort.

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Les compositions du groupe, quant à elles, couvraient tous les styles de Tom Waits et au-delà avec ce sens du tragi-comique propre à l'âme slave. Un Gospel/Rock'N'Roll rappelait le "Walking Spanish" de Waits sur "Rain Dogs", ponctué de cris de Billy Novik:"Jââââzz" et "Kazaktchok", tandis que la guitare et le saxophone semblaient jouer en duel face à face, le saxo utilisant fréquemment l'espace en jouant dos au public, sur un fond d'immeubles noyés de bleu liquide.

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L'oreille marquée par cet anglais à l'accent russe, l'on croit aussi entendre des mots anglais dans les chansons en russe, entre "rutzki" et "catholi" des relents de "California, Coca-Cola", au point de ne plus savoir si c'est Billy s'essayant au Tom Waitsien ou Tom Waits baragouinant en russe, des colmobes conciliatrices s'envolent en fond à la fin de la chanson, résolvant ce conflit, ou peut-être de l'un à l'autre, d'Amérique en Russie ou de Russie en Amérique... Sur la scène et l'écran également, où le groupe était filmé en gros plan très déformant , les mimiques de faux borgne tourmenté de Billy Novik le font ressembler de plus en plus à son idole au fur et à mesure du concert.

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Une jolie composition faisait voyager le public à St Petersbourg, où vit Billy Novik, sur fond d'immeubles liquides, le saxophone perché sur l'ampli faisant passer l'ambiance de cette ballade du cool au cri déchirant par son solo, et Billy finissant en scat. Une autre chanson de ce groupe décidément voyageur, présenté comme "Mes saisons parisiennes", était introduite parodiquement par les clichés d'usage du Russe à paris: "Je suis à Paris, tout est OK avec l'argent, hier je me suis acheté des saucisses fraîches", sur fond de manèges et de foules, de fêtes foraines et de chevaux de bois, qui, accélérés semblent faire tourner des disques ou des crêpes comme dans "Amélie Poulain".

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Une ballade amoureuse désamorcée par la parodie introductive: "A propos de l'Amour... Tu sais bien ma chérie que personne ne t'aimera jamais autant que moi, personne n'est assez fort pour cela et.. personne n'a assez d'argent pour cela, bien sür", puis la voix brisée de Billy énonçant pluie, foudre, présidents morts, sur fond de scie musicale vocale du reste du groupe en choeur (hooooooo). Très loin de ces traditions, le groupe excelle aussi dans l'"alcoolo-tango" très Waitsien avec pluie de confetti et "Bluuuuuues" final.

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Sur la chanson suivante, "une histoire de fantôme", sur fond de vieilles chanteuses et actrices en noir et blanc, avant l'intervention fracassante du guitariste aux cymbales, qui, comme pris d'un soudain coup de folie, saute de la scène et court et les entrechoquant dans la salle...

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Le groupe peut aussi se jouer de ces genres qu'il maîtrise si bien , passant de l'intro d'un Blues "très désespéré, aussi solitaire que dans un désert", puis "accélérer le rythme trente fois", pour aboutir à la chanson la plus joyeuse et festive du concert, au rythme ska, sur fond de danseuse orientale, bonne fée ou bimbo blonde MTV, voiture de nuit, lumières de Noël sur l'obélisque à Paris...

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Enfin, en bis, Billy Novik interprèta la chanson la plus "russe" de Tom Waits, "Rain Dogs", puis, rappelé encore aux cris de "Daway" ("à donf'" en ukrainien, probablement appris au public par le groupe russe Gortopravci qui s'était produit le samedi précédent avec Red Cardell au festival), Billy Novik s'empara de la guitare, prétendant ne pas savoir en jouer, se contredit par les accords magnifiques d'une version bouleversante de "BlueValentine", ballade d'un Tom Waits encore chanteur de Jazz sur l'album du même nom, que presque personne n'aime sauf moi, idéal pour les retours arrosés où les petits matins vous donnent envie de vous faire un trip détective privé ou flic américain des années 50s en fin de parcours avec Humphrey Bogart dans votre rôle ou vous dans le sien.

Jean Daniel BURKHARDT

PS: Billy's Band reviendra dans les Nuits Européennes 2008 dans un lieu autrement plus festif et "Cabaret Russe" pour sa déco Baroque riougeoyante: "Au Camionneur", avec le group vocal féminin punk-rock "Iva Nova", également de St-Petersbourg, ville avec laquelle le festival "Les Nuits Européennes" a établi un partenariat d'échanges musicaux. Parallèlement, l'un des organisateurs, Jean-Etienne Moldo produit plusieurs groupes slaves dont "Sui Vesan", dont la chanteuse mérite votre attention sur le site "Slavomix"

LE DUO PALESTINO-SUISSE WAMEEDD A PÔLE SUD POUR LES NUITS EUROPEENNES

Wammeedd réunit la Chanteuse et joueuse d'oud Palestinenne Kamilya Jubran et le musicien électronique suisse Werner Hassler dans un duo au-delà des préjugés culturels et géopolitiques autour de textes de poésies orientales contemporaines chantés. "Wameedd" signifie "étincelle", celle peut-être du bois naturel de l'oud et de ses cordes allumant dans leurs prolongements dub électroniques les illusions sonores d'autres instruments naturels absents: cordes d'un qanun (cithare à plectre pratiquée dans le même esprit d'ouverture ethnique avec le flamenco de Pedro Aledo et avec l'électronique des synthétiseurs par le syrien Abed Azrié sur leur album "Suerte"), harmonium portatif Pakistanais à soufflets, , orgue oriental, de barbarie ou à verres d'eau, autant d' ancêtres traditionnels de l'électronique semblant en resurgir par instants, clarinette turque "zurna" électronique ou guimbarde soudaine.

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Quelques danses rythmiques aussi, ébauchées dans les tapotements de Kamilya Jubran sur son oud introduisant un univers à la Natasha Atlas que Werner Hassler prolonge en dub comme Jah Wobble en son temps, ou suggérées par des claquements de mains rythmiques de mariages sans youyous ou transes des musiciens Gnawas.

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Le tout appelle à la rêverie sur les paroles des poèmes et la voix de Kamylia Jubran, Werner Hassler érigeant des minarets sonores, inventant dans ce désert sonore des bruits de pas lourds, comme de chameaux ou d'élephant répondant à ceux du poète de Beyrouth Paul Shaoul dans "Amshi", ou se liquéfiant en oasis rafraîchissantes, puis tremblant de la chaleur fièvreuse qui nous trompe et fait s'évanouir devant nos yeux leurs mirages, en espèrant que le rêve se fût prolongé.

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Parfois le rêve nostalgique tourne au cauchemar de la guerre dérangeant l'ordre naturel d'une enfance solaire (toujours Paul Shaoul dans le triptyque "Nafad Al-Ahwal" : Les conditions éreintantes), mais cette violence qui menace dans la musique de Wameedd semble toujours s'arrêter juste avant d'éclater, comme larvée, obsessionnelle mais n'étant jamais musicalement qu'un présage, jusqu'au cri final, ultime, comme le "cri trop longtemps étouffé" du dernier poème, ,"Mira'at Al-Hijarah" de Fadhel Al-Azzawi, poète Irakien exilé à Berlin et très dur à trouver dans son propre pays, cri modulé dans l'aïgu de Kamilya, éclatant comme un orage pressenti, fracassant quand on ne l'attendait plus mais évident comme si toute la prestation tendait vers cette explosion, soulignée par la machine dont les échos la prolongent dans ses dernières résonnances jusqu'au silence final...

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Et si le secret de l'unité de ce duo magique qu'on penserait improbable se cachait dans le mot étrange et beau d'un des poème d'Aïcha Arnaout, poètesse Syrienne rencontrée par Kamilya Jubran à Paris après avoir lu son livre? Dans "Ankamishu'", elle parle de "géminé invisible", paire dont les doubles ne seraient pas en contact ensemble...Plus que son "géminé", l'électronique semble naître de la voix comme son prolongement naturel et l'entourer à la fois comme une mer où elle nage, ou comme un écrin protège un bijou. Gémellité, gémination indissociable de ces deux musiciens, à la fois un et multiples. Indissociable et impensable complicité dont les mystères semblent insondables, entre poésie, voix, bois naturel, cordes et prolongements électroniques infinis.

Jean Daniel BURKHARDT

P.S. En commentaire, les amateurs de poésie orientale trouveront la version longue de cet article, plus cursive et transcrite de mes notes pendant le concert, le nom des poèmes, des poètes, etc...

SOCALLED A L'ILLIADE POUR LES NUITS EUROPENNES 2007

Josh Dolgin, alias SOCALLED, "ainsi nommé" ou "soi disant" est un rappeur d'origine juive de Montréal qui a découvert la musique yiddish avec un vinyle d'Aaron Lebedeff, et ne trouve pas "so unusual being a jewish cowboy" dans "You Are Never Alone", chanté par la chanteuse de Montréal Cathy Moore.

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Il joue de l'accordéon de manière très juive traditionnelle, l'agrémentant d'onomatopées scats classiques de la musique yiddish (Yam Dilili, Yam Poro Hai), s'accompagnant au fender rhodes (de marque "Kurzweil" comme une référence à l'auteur juif allemand de "Drei Groschen Oper", "Opéra de Quat'sous") de beats futuristes rythmés par la respiration spirituelle de samples de vieux choeurs yiddish, que l'on entend pas souvent voire jamais dans le hip-hop, avec un saxophoniste noir anglais à fausses dents de vampire, pouvant être fidèle rythmiquement à la pulsation hassidique de la musique klezmer, voire évoquer ses couinements de clarinettes caractéristiques, la faire évoluer vers les contrées de l'Afro Beat à la Fèla Kuti, enfin la pousser jusqu'à la liberté du free jazz, un guitariste du New Jersey et un bassiste groovy qui complètent l'ensemble.

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Josh Dolgin semble croire que nous puissions le comprendre, comme si deux dérivés de l'allemand (le yiddish de ses chansons et notre alsacien local) pouvaient s'entendre, avant une chanson à l'humour juif accompagnée à l'accordéon ou, croyant embrasser en rêve "sein schatz"(chérie), il se réveille embrassant "sein katz" (chat) mais s'offusque si on rit de sa mésaventure à la manière outrée d'un Woody Allen dont ses lunettes et son humour lui donnent l'aspect.

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Qui a dit que le Canada était un pays froid aux hivers toujours blancs ou Robert Charlebois rêvait de "se marier avec l'hiver"? Hélas le réchauffement climatique est passé par là depuis les belles années 70s et cette chanson... Elle empêche par l'absence et la fonte des neiges les Montréalais de skier, comme s'en plaint la chanson "Oh No There Is No More Snow", sur une base musicale de skiffle irlandais ou country passés au Canada pour prolonger leurs reels par celui de Ste-Anne au Carnaval de Chicoutimi. D'ailleurs la rousse Catthy Moore tape le rythme du pied comme dans un Pub de Kilkenny.

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Brusquement, l'alarme à incendie pour une fausse alerte, après un bruit sec, interrompt le concert, qui se continue sur le parvis de l'Illiade, Josh Dolgin y entraînant le public au son de son seul accordéon, comme sur une place de village, changeant le feu follet en feu de camp, en feu de joie ou de la st Jean, bientôt rejoint au pied levé par un rappeur local de Woodstock (USA), dont vous pourrez entendre le premier concert le 25 novembre à Molodoï, qui rappe en espagnol sur le "Fuego", soutenu par le saxophoniste aux percussions.

Pour moi aussi, il y a le feu: celui du dernier bus de Minuit, ultime carosse de Cendrillon avant la grève des transports décalée au vendredi. Reportez-vous donc à l'article de Jean Etienne Moldo ci-devant pour la fin de cette belle soirée. Ce soir, ce sera la Kinky Beat Barcelonaise et sa chanteuse Miry Matahari (tout un programme!) qui mettra le feu à la Salamandre!

Jean Daniel BURKHARDT

PS. Socalled reviendra mixer cette année dans les Nuits Européennes, avec l'un des plus grand clarinettiste Néo-Klezmer Américains de la scène juive New-Yorkaise : David Krakauer et son "Klezmer Madness", le vendredi 18 octobre 2008 à la Salle Du Cercle de Bischeim à 20 h 30

ANTIQUARKS A L'ILLIADE POUR LES NUITS EUROPEENNES 2007

Antiquarks? Le "Quark" (mot anglais tiré de l'oeuvre de James Joyce, ce qui est déjà intéressant en soi et promet des sens multiples et dans toutes les langues) serait une "particule fondamentale qui entrerait dans la constitution des hadrons", et l'"Antiquark" son double indispensable pour former un élément spatial si j'ai bien compris.

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Le duo Lyonnais "Antiquarks" a sorti un album en 2006 et a fait 80 dates depuis. Dans le duo "Antiquarks", il y a Sébastien Tron à la vielle à roue libre, faisant entrer cet instrument jusque-là condamné au crin-crin du bal folk-à-grand-papa depuis le Moyen-âge, quand l'un des personnages fictifs du duo partit sur les mers sauver les Indiens d'Amérique "pour qui ça commençait à chauffer", dans l'âge de la "Vièll'ectro" Transe, car bardée d'efets joués nu-pieds (échos, distos, samplers, que sais-je encore?), mais retrouvant à la fin en bis ses cordes pincées sans artifice, entre la cithare guzheng Chinoise et les vagues de "La Mer" quand la harpe celtique d'Allan Stivell les chante.

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Son "Quark" complémentaire est Richard Monsègu, batteur tellurique d'un Magma en fusion volcanique s'inspirant souterrainement de toutes les langues pour ses vocaux hors-normes. En effet, là où Christian Vander, batteur du groupe mythique "Magma", a crée de toutes pièces une langue propre, le Kobaïen, Monségu, lui, s'en joue, les mixe et les mélange toutes dans une grammaire qui lui est propre, unique et sublimant tout sens par sa musicalité. Parlant couramment "yaourt depuis l'âge de quatre ans", Richard Monségu se moque de l'anglais dans un Blues urbain aux percussions terroirs sur le bois de la vielle par Sébastien Tron. En bis, Richard Monségu accompagna les cordes de la vielle d'un infinité de petites cymbales délicates évoquant autant les gongs des gamelans indonésiens ou balinais par leur finesse, que la musique des sphères stellaires par leurs résonnances, tandis qu'un diorama d'ombres et de lumières nimbait la salle dans une atmosphère propice à la rêverie cosmique.

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Qui est le quark, qui l'anti-quark de l'autre, en ce binome à la fois improbable, inséparable et finalement parfait dans son unité interactive? De toutes façons, ils se revendiquent "interterrestres" sur leurs T-shirts, et ont bien raison: les galaxies c'est loin (quoique à les entendre...), et pourquoi ne pas commencer par interagir déjà sur notre bonne vieille terre?

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Jean Daniel BURKHARDT

dimanche, juin 10 2007

Suprise au J&B: Guess Who's the Guest! Devinez qui fut l'invité surprise!

Vendredi 1er Juin dernier, le 4ème Festival Electro Groove "Contretemps" invitait pour sa première soirée des DJs, de jeunes artistes locaux et un guest surprise au J&B (ex Jimmy's Bar). Côté DJ, DJ Boub, de Nancy, après avoir fait la première partie de Daddy G de "Massive Attack", anime sur "Right On FM" son "Off World Radio Show" dédié au groove sous toutes ses formes. Il a récemment remixé en reggae "Hurry On Now" de la chanteuse Soul anglaise Alice Russell (entendue dans le festival l'an passé) et l'a envoyé à tout hasard, ignorant qu'elle préparait un disque de remixes pour le label "Tru Thoughts",où il a été publié. Ses interludes funk, groove ou jazz ("My Baby Just Cares For Me" par Nina Simone) furent bien plus que des bouche-trous entre les artistes locaux, et plus attrayants en terme de nouveauté et de surprise pour les habitués. Twan.jpg Côté local, on a pu y entendre Loomaë, duo de la chanteuse Soul aux influences ethniques Maeva avec son guitariste, Yan (guitariste accompagnateur très recherché dans la région qu'on a pu voir aux côtés du chanteur Soul reggae Abdi) qui se lance en solo dans un registre "Nu Soul", dont a pu apprécier une reprise accoustique originale du "RH Factor" (projet Funk Soul Hip Hop) de Roy Hargrove issu de son premier album "Hard Groove". Enfin, Twan est aussi connu à la tête de son groupe reggae que comme auteur compositeur interprète de ses propres chansons qu'il accompagne à la guitare, avec pour l'occasion les percussions vocales d'un ami au "beat box"plutôt plus fin et rythmiquement plus intéressant que ce à quoi nous a habitué le hip hop en la matière. Lalanne_People.jpg Quant au guest invité surprise qui les rejoignit sur scène, quelques indices préalables: de bas en haut, il est chaussé de bottes tel un mousquetaire et a un léger accent du Sud (mais ce n'est pas D'Artagnan de Gascogne), porte une guitare en bandoulière, écrit et chante des textes fort poétiques (mais ce n'est pas Francis Cabrel) y promettant même que l'amour conjure la mort, porte des cheveux très longs qui lui ont valu le surnom de '"L'Indien" à ses débuts dans les années 70s, a fait un récital de douze heures et prend sur scène un plaisir physique évident, et est aussi capable de jouer les peoples trublions et clownesques dans les talk-shows télévisés (Gainsbourg, autre génie de la chanson adepte de la provocation télévisuelle a dit un jour: "la bêtise, c'est la décontraction de l'intelligence" et ils sont tous deux très intelligents) ou d'y pousser des cous de gueule passionnés, a été un supporter peinturluré de manière tricolore de l'équipe de France de football même lors de leur échec Coréen, ce qui relève de l'exploit en terme de fidélité! Lalanne_Foot.jpg Accessoirement, et ceci explique plus que toutes ces informations sa présence à Strasbourg, il se présente aux élections législatives sur la liste écologiste de l'alsacien Antoine Waechter pour "Strasbourg 2" (Quartier de la Krutenau, qui jouxte le J&B sur l'arrière), et se mettait en scène récemment dans son clip de campagne sur fond de sapins (Vosgiens?) pour faire couleur éco-locale. Il s'agit de... Francis Lalanne bien sûr! Lalanne_vert.jpg Il est plutôt sympathique de le voir dans la région avant les élections, et il paraïtrait qu'il aurait la ferme intention de s'y établir pour y gérer un bar. Ayant pris les auspices en plongeant à l'aveugle sa main dans sa collection de figurines de plomb régionales, il en aurait retiré une petite alsacienne avec sa coiffe, ce qui aurait achevé de le convaincre que le sort le menait à Strasbourg. Continuant sur sa lancée, on l'aurait vu dès le lendemain sur le bateau-bar "L'Atlantico" présenter son programme! Au moins ne pourra-t-on pas dire que le "parachuté" n'a pas tout fait pour se faire connaître dans la région! De là à affirmer qu'il y restera, on peut gager qu'un artiste de cet ampleur aura vite fait le tour des opportunités de carrière s'offrant à lui dans la région!

D'autres chanteurs français sont authentiquement originaires d'Alsace: Jacques Higelin , qui est bien trop fou et trop poète pour se présenter aux élections, mais qui nous avait fait il y a quelques la primeur de son spectacle "Higelin Enchante Trénet" (hommage à sa première idole Charles Trénet grâce au répertoire duquel il gagna plusieurs concours et radio-crochets dans la région) sous le chapiteau du Jardin des Deux Rives avec une décontraction sympathique, Alain Bashung qui est bien trop pessimiste et blasé pour croire à la politique, et Herbert Léonard, qui semble renier ses origines strasbourgeoises et modestes. En ce jour de premier tour des élections municipales où la vague bleue devrait submerger ses sapins verts, je ne puis m'empêcher de rêver à un député Francis Lalanne secouant l'Assemblée Nationale de sa passion généreuse et de ses coups de gueule, voire de sa voix... ç'aurait été amusant, non?

Jean Daniel

Ci jointe une photo de Francis Lalanne prise ce soir-là au JB. Merci à Léane Laures du blog "Skyblog de lyne67 Strasblog" qui me l'a envoyée.

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lundi, mai 28 2007

Manu Dibango a joué Sidney Bechet en concert au Maillon vendredi soir.

©ñ{Le saxophoniste Manu Dibango est né au Cameroun, à Douala, le 12 décembre 1933. Son père, producteur de café, donnera "Trois kilos de café" (titre de son autobiographie) à un de ses clients français pour lui permettre de faire ses études en France, où il part en mars 1949. Hébergé tout d'abord dans la Sarthe, il fait ses études à Reims, puis à Paris. Il sera donc l'un des témoins authentiquement africains de l'explosion du Jazz Be Bop et New Orleans dans les clubs dans les années 50s. Devenu musicien de jazz professionnel en 1957, il s'installe à Bruxelles et joue dans les clubs, avant de revenir en Afrique en 1962, au Zaïre, avec un des pionniers de la rumba Zaïroise, Kabassélé et son African Jazz, et y enregistre ses premiers disques pour le marché africain, avant de retourner au Cameroun, où il tente de monter des clubs, sans grand succès. En 1969, il est de retour en France, et devient l'arrangeur des cuivres de divers chanteurs, dont Nino Ferrer, qui chante à l'époque un titre inspiré parodiquement du funk de James Brown, "Je voudrais être noir". Dans les années 70s, Manu Dibango retourne en Afrique, fait de l'afro beat dans la lignée de Fèla, et rencontre le succès grâce à la face B d'un disque écrit pour l'équipe de football Camerounaise des Lions indomptables, le célèbre "Soul Makossa" qui lui permettra de se produire aux Etats Unis devant des stades, avant de devenir le morceau le plus plagié de l'histoire de la musique américaine (par Michael Jackson, Jennifer Lopez, entre autres).

Mais en Afrique, venant d'Europe, il est considéré comme riche, et doit payer pour les autres, ce qu'il relèvera avec humour dans "Ah Freak Sans Fric". En 1979, c'est en Jamaïque que souffle le vent de la nouveauté avec le reggae, il y enregistre à Kingston avec Michael et Randy Brecker et Sly & Robbie, restant le meilleur exemple de métissage entre l'Afrique où il est né, la France où il a grandi et les deux Amériques où il se produit.

Dans les années 80s, il rentre en France, et profitera de la vogue des musiques traditionnelles pendant les années Mitterrand, pour s'exprimer dans les nouveaux styles nés en Afrique. Il aura même son émission de Télévision, "Salut Manu", sur France 2. Les années 90s le verront faire du rap avec "Senge Abele". Dans les années 2000s, Manu Dibango a invité plusieurs rappeurs antillais sur ses disques, puis en 2004, on a pu le voir à la tête de son premier Big Band, le "Maraboutik Band".

Enfin, en 2007, Manu Dibango a étonné le monde du Jazz en revenant aux sources de son amour pour cette musique en reprenant des airs de ou interprétés par le saxophoniste soprano de La Nouvelle Orléans Sidney Bechet qu'il allait écouter jouer avec Claude Luter quand il était lycéen au caveau des "Lorientais". Une pensée émue pour La Nouvelle Orléans, berceau du jazz ravagé par l'ouragan Katrina n'est pas étrangère à ce choix. Surprenant, mais il trouvait intéressant d'aller "là où on ne l'attendait pas."

Pour cet album, Manu Dibango s'est entouré d'une formation rompue au style New Orleans/Swing des années 50s: le vibraphoniste Dany Doriz, animateur du "Caveau de la Huchette", Didier Havet au tuba pour rappeler les fanfares des "Mardi Gras" de La Nouvelle Orléans où commencèrent tous les pionniers du jazz, Patrice Galas au piano incluant des vieux éléments ragtime et stride, Lucien Dobat à la batterie bringuebalante encore un peu marche de rue comme l'exige ce style de jazz classique dans la lignée de Baby Dodds et la chanteuse Kristel Dobat, enfin Slim Pezin à la guitare, secondé par le jeune Nicolas Preslier à la guitare et au banjo, pour le côté Jazz. Mais le côté Africain et caraïbe était aussi représenté par le bassiste Noël Ekwabi, compagnon de longue date de Manu Dibango, et le percussionniste noir Guy Nwogang.

Le groupe entre sur scène sans Manu Dibango, et se lance dans un Boogie woogie effrené, que Manu Dibango rejoint sur la fin pour relancer l'improvisation d'un musicien après l'autre de ses riffs ravageurs. Il faisait sous le toit du Théâtre du Maillon une chaleur accablante, qui ne dépaysa pas Manu Dibango: "Il fait chaud chez vous. on se croirait en Afrique!" Mais si l'on prêtait attention à la musique , on l'oubliait facilement. Le concert continua avec un des thèmes composés par Sidney Bechet lors de sa seconde carrière en France, "Dans Les Rues d'Antibes", thème New Orleans entraînant mais à la mélodie magnifique. Voir Manu Dibango jouer Sidney Bechet au saxophone alto sous ses lunettes de soleil et avec cette énergie fait penser à Charlie Parker qu'il avait rejoint à Paris, quoiqu'invité par le très conservateur Hugues Panassié, à la Jam des Refusés du Festival officiel organisée par Boris Vian et Charles Delaunay (une photo très sombre l'atteste, mauis j'aurais bien aimé entendre sur quel terrain d'entente s'étaient déroulés leurs échanges), en cette belle époque où le Jazz déchaînait encore les passions entre vieilles figues moisies défendant le New Orleans Revival et le Swing d'avant-guerre et jeunes raisins verts en faveur du Be Bop et de la nouvelle génération de Charlie Parker, Dizzy Gillespie et Miles Davis. Pour exemple, le "Hot Club de Strasbourg" fut excommunié pour avoir reçu le trompettiste Chet Baker dans les années 50s! Charlie_Parker_et_sidney_bechet.jpg Le concert continua avec une autre composition de Bechet très prenante dans ses reprises d'une mélodie superbe jouée de plus en plus haut sur son saxophone soprano, "Si Tu Vois Ma Mère" ("qui est partie aux Antilles" annonça Manu Dibango pour présenter le tempo de sa version). Manu Dibango se fit épicier fort en voix d'un de ces marchés du Sud de la France pour lancer les improvisations sur le thème le plus célèbre en France de Bechet, "Les Oignons": "Venez goûter mes oignons, ils ont pris le soleil. Et un deux trois quatre oignons (solo)". La chanteuse Kristel Dobat ajouta la sensualité féminine et la présence des chanteuses mythique du jazz dans le répertoire partagé par Bechet avec Louis Armstrong, aussi puissante que Janis Joplin dans "Ain't Misbehavin'" de Fats Waller, mélancolique comme Billie Holiday, "bonne futée" avec Louis Armstrong dans le fim "New Orleans" pour "Do You Know What It Means To Miss New Orleans?" (nostalgie que Manu Dibango justfia comme "tout ce qu'il reste après Katrina de la beauté de New Orleans"), ou scattant comme Ella Fitzgerald à Berlin sur "Mack The Knife" (à l'origine "Mäckie Messer" composé en allemand par Berthold Brecht et Kurt Weill pour leur "Drei Groschen Oper", "Opéra de Quatre Sous"). Le premier bis fut le méconnu mais magnifique "Georgia Cabin", suivi sous les applaudissements du public d'un Gospel immortalisé par Louis Armstrong et tous les groupes New Oreleans et Dixie Land "When The Saints Go Marchin'In", puisque les gospels firent aussi partie de l'enfance musicale de Manu Dibango en Afrique.

Bref, le pari fut tenu haut la main: insuffler au Jazz traditionnel New Orleans de Sidney Bechet, depuis lequel le Jazz a beaucoup évolué, son énergie première telle qu'il l'a vécue à Paris, celle de l'Afrique qu'il connaît mieux que Bechet par sa naissance, sa bonne humeur communicative et son humour légendaire (son côté Louis Armstrong peut-être), tout cela faisant la profonde universalité de la musique de Jazz d'hier et d'aujourd'hui.



Jean Daniel BURKHARDT

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