Le Festival Les Nuits Européennes est l’un des rares festivals Strasbourgeois à relayer cette année La Saison de la Turquie en France, avec le Festival Strasbourg Méditerranée qui se tiendra du 21 novembre au 5 décembre.

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Pour cette deuxième soirée à La Reithalle d’Offenburg, c’est la scène Stambouliote qu’il y invite, avec tout d’abord le groupe de musique musique soufie/ electro / vidéo « Istanbul Calling » puis le grand darboukiste et chanteur Burhan Öçal et son Ensemble Oriental d’Istanbul, jouant de façon plus traditionnelle le répertoire savant, populaire et Tzigane Turc avec des Tziganes Turcs. Le public Turc, allemand et français par l’ASSTTU s’est déplacé et cette belle jeunesse turque bouillonnante ajoutera ses danses et sa joie de vivre au spectacle de la scène.

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Istanbul Calling est une formation du producteur Oguz Kaplangi (synthétiseur et sampler), ex membre du collectif Zi Punt avec Huseyin Bitmez (oud et chant ghazel), Ayyup Hamis (ney, duduk, zurna), Amdi Akatay (darbouka et bendir) et Efe Isildaksoy (vidéo), qui a sorti son deuxième album en 2007 sur le label « Elec-Trip Series ».

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Dès «Her Daim » de l’oudiste et chanteur Hüseyin Bitmez, où le ney (flûte de bois turque utilisée dans la musique soufie) plane sur des percussions orientale est des basses beats du DJ, puis un dub oriental hypnotique à la Transglobal Underground, auxquels se mêlent bientôt la voix orientale émouvante et les cordes du compositeur sur le bonnes guitares rock groovy du DJ. On entend que, par des compositions respectueuses de l’improvisation collective et une mise en place sonore aux interventions bien réglées, musiciens Live et DJ cohabitent avec bonheur dans cet univers musical unique mais évoquant fortement la scène des clubs Stambouliotes des clubs (l’une des villes les plus actives musicalement), avec le même charme Cinétique universel que le Cinematic Orchestra, et l’exotisme de l’Orient en plus.

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Les vidéos ajoutent au tableau des vues magnifiques d’Istanbul, aux couleurs modifiées par des effets visuels fascinants où l’on retrouve toutes les images qu’on rapporte à cette ville : une danseuse du ventre vert lapis-lazuli, le pont sur le détroit du Bosphore entre Orient et Occident, qui traverse Istanbul entre Ortaköy (sur la partie européenne) plus urbaine où se concentre l’activité économique et Beylerbeyi, plus naturelle (sur la partie asiatique) parcouru par les ferry très appréciés par les habitants (dont certains vivent sur la rive Asiatique pour la qualité de vie et travaillent sur la rive occidentale), la Cathédrale Ste Sophie, devenue un Temple à la Sagesse après avoir été disputée par Chrétiens et Musulmans pendant longtemps, des autoroutes nocturnes aux voitures lumineuses, et des vues se mêlant en papillons, et finit dans les étoiles et sous la mer, accompagnant magnifiquement la musique.

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Sur « Tansu Kaner » (Sleepless Constantinople : Constantinople qui ne dort jamais), le DJ rajouta la magnifique voix de la chanteuse Ceren (comme l’héroïne de la Légende des Mille Taureaux de Yachar Kemal) Bektaç (comme le soufi Haçi Bektash Veli , fondateur des Janissaires et disciple de Rûmi, fondateur des derviches tourneurs). Il rendit aussi hommage au quartier musical d’Istanbul Beyoglu. Sur un autre titre, le flûtiste et parfois chanteur Eyup Hamis utilisa, après le ney et le kawal (flûte plus petite) le zurna, sorte de petite clarinette turque, qui souvent précède les manifestations publiques, avec un intensité Jazz et presque Rock dans le son perçant.

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Enfin, le percussionniste Hamdi Akatay termina à la percussion dhol arménien (gros tambour joué à mains nues ou avec des mailloches dans les manifestations ou par les janissaires partant au combat), sur un rythme qui, de Constantinople, inspira la musique Irlandaise.

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De jeunes Turcs et Turques dansèrent en ligne en se tenant par le petit doigt comme aux mariages et autres manifestations, ajoutant leur authenticité spontanée au concert.

En seconde partie, on pouvait entendre le percussionniste Turc mythique Burhan Öçal à la darbouka et l’Ensemble Oriental d’Istanbul, composé de Tziganes comme Ahmet Demikiran au cubus (sorte de banjo tzigane turc)., Vesar Akirlar (clarinette), Umit Adakale (seconde darbouka), le turc Mehmet Celiksu au kanun (cithare orientale habituellement sur table, jouée ici sur les genoux et sans plectres avec les doigts) et le grec Ismail Papis au violon, dans un répertoire Tzigane, Classique Ottoman et populaire Anatolien.

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Je me souviens d’avoir vu Burhan Öçal en solo à la darbouka au milieu des années 90s au Cinéma l’Odysée de Strasbourg.

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La prestation était dans l’esprit de son album « Grand Bazaar » et de celui déjà présenté devant Paris Hilton qui dansa à sa musique.

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Le temps qu’Ahmet Demikiran accorde le jack de son instrument, à la demande du public, Burhan Öçal fit entendre un duo de darbuka improvisé avec son percussionniste Umit Akadale.

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A la darbouka, il utilise toutes les ressources de l’instrument, avec un micro est placé à l’arrière pour rendre les effets intérieurs sur la caisse de résonance, tandis que l’autre main assure les percussions digitales, joue d’ailleurs aussi bien de cette manière transversale sur le genoux qu’à plat entre ses cuisses.

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Il commencèrent la première suite par le tango Egyptien «Ya Habibi Ta’ala » de la diva arabe Asmahan, récemment repris par le Kronos Quartet dans son dernier album, puis bifurquèrent vers la musique classique Ottomane de cour (qui utilisait plutôt l’oud et les percussions, peu la clarinette ou le violon), mais ravivée par cet instrumentarium plus Tzigane qu’Ottoman, où Burhan Öçal se révéla aussi un extraordinaire chanteur dans le style de Cinuçen Tanrikurir dans ses concerts de Fasil à la voix profonde et rallongeant les voyelles sur les rythmes arabes et turcs sur de longues suites où les titres se suivent sans pause, comme à la cour d’Istanbul ou encore dans la musique Tadjike, puis change de rythme comme une cavalerie bifurque en plein désert vers d’autres thèmes, tout en restant dans le même thème. On entend, même sans connaître ce répertoire, combien la musique arabe, turque et tzigane se mêlent sous les doigts de ces musiciens émérites.

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Les solos de clarinette entre tzigane, Jazz et klezmer, puis de violon dans les aigus, et Mehmet Celiksu au kanun, plutôt discret en rythmique, fut surprenant de finesse dans son solo, proche d’une harpe celtique à la Alan Stivell.

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Enfin, après ce répertoire classique mêlé de rythmes populaires, il termina par une surprise en terminant son set au tanbur (sorte de guitare turque effilée, instrument des baladins et des montagnes) et au chant par des Chants d’Amour et de Sagesse d’Anatolie, mêlées de danses populaires de cette région montagneuse et sauvage..

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Je n’avais pas vu la jeunesse turque danser, mais elle était plus nombreuse à le faire, de l’autre côté de la scène.

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Le Festival se poursuit ce soir 13 octobre 2009 à 20 h avec une autre soirée Turque : Ilhan Ersahin, saxophoniste porte-drapeau de la Saison de la Turquie en France invitera le trompettiste Erik Truffaz dans un projet Oriental Electro Jazz, puis Gevende, un jeune groupe Turc aux influences voyageuses de l’Inde au Népal et à l’Iran dans un esprit folk-rock psychédélique.

Jean Daniel BURKHARDT