Après l’orage et quelques pluies suivant le set plus Jazz Funk qu'à son habitude de G Phil passant le superbe "Turkish Bath" de Weldon Irvin, les concerts des Pelouses Sonores gratuites ont pu se poursuivre sous le soleil dimanche 7 juin à L’Orangerie, avec deux Live, un set Reggae et du dub.

Orangerie_MMEW_loin.jpg

Tout d’abord le MMEW (Musique Municipale Espérance de Wasselone), qui sous un nom pas très fun est la plus funky des harmonies locales grâce à un répertoire Soul 60ies et des arrangements sur mesure signés par le guitariste Bernard Struber (ORJA, Bernard Struber Jazztet et ZTet sur Zappa).

MMEW_Struber.jpg



Les deux excellentes chanteuses commencent par un medley du Stevie Wonder ave « Isn’t She Lovely », dont le bébé, la fille de Stevie Wonder qu’on entendait en 1976 dans « Songs In The Key Of Life » chante désormais avec lui sur scène, "Another Star", plus Brazil, servie par des nuances de Frevo des cuivres et anches, puis «Sir Duke » extraite du même disque, plus swinguant, en version instrumentale avec solo de saxophone, et finalement la ballade « I Just Called To Say I Love You ».

Stevie_Wonder_Songs_In_The_Key_Of_Life.jpg

Autre production du label Motown , la composition de son producteur Jerry Gordy « I’ll Be There » pour les « Jackson 5 » Il y avait aussi les « Jackson Sisters » qui enregistrèrent «I Believe In Miracles » en 1976, repris récemment en Dub Soul par les Dynamics qui se produiront à CONTRETEMPS en Live au Molodoï demain samedi 13 juin..

Jackson_Sisters_Miracles.jpg

Les cuivres firent de beaux fonds sonores derrière les chanteuses dans « Georgia On My Mind », standard de Jazz d’Hoagy Carmichael popularisé par Ray Charles.( ).

Ray_Charles_Georgia.jpg

Elles poursuivirent avec « Respect » d’Aretha Franklin, à l’origine chanté pour le respect plus racial que féministe par Otis Redding, qui disparut trop jeune dans le même accident d’avion que Buddy Holly et dont l’harmonie reprit plus tard le plus connu « Sitting On The Dock Of The Bay ». Sur ce classique « Respect », il faut reconnaître que l’harmonie était vraiment pêchue et à ses cuivres un swing impeccable. D’’Aretha, ils reprirent aussi « Chain Of Fool ».

Redding_Restect_Live.jpg

Suit un thème Disco d’Earth, Wind & Fire, « Keep Your Head To The Sky » avec un bel unisson flûté des saxophones.

Earth_Wind___Fire_Keep_Your_To_The_Sky.jpg

Elles enchaînent avec une reprise de la chanteuse Soul à voix très aigue Minnie Riperton dont « Lovin’ You » fut reprise dans la BO du « Journal de Bridget Jones ».

Minnie_Riperton.jpg

Ils terminèrent par un medley endiablé de Kool & The Gang incluant « Ladie’s Night », qui fit danser Flore, Mélanie et quelques autres Soul Sisters comme à Woodstock, ou plutôt comme au Festival Soul Power de Kinshasa dont le festival diffusa en avant-première le film le mardi 9 juin () .

Kool___The_Gang__Ladie__s_Night.jpg

Bref, ces reprises du MMEW furent les plus beaux hommages live à la Soul Music du Festival Contretemps. Le MMEW se produira à Wasselone le 20 juin à 20 h pour la fête De La Musique.

Daddy_Roudy_micro.jpg

En entracte, Daddy Roudy selecta des Dance Hall Vibes avec Skunk Head (qu’on retrouvera le 17 juin à Molodoï et le 21 juin Place Rouge pour la Fête de la Musique) anima dynamiquement un set Reggae Ragga.

Daddy_Roudy_Skunkhead_portrait.jpg

Suivit le groupe de funk local Greenstuff et ses compositions style Funk 70ies à s’y méprendre avec Pascal Beck (Sonando, VSP Orchestra) au trombone, Yan ( chant et guitare), Bill (chant et basse) , Piment (chant et batterie) et Smith (chant et claviers).

Greenstuff_band.jpg

Ils commencent par « Keep On Movin’», chanté par le guitariste, au trombone tailgate funky sur le fender rhodes et au chant énergique, suivi de « Boum Boum » (Shake It and Wait), avec un groove à la Jamiroquai et un scat du guitariste sur fender rhodes sur « I’m On My Way » et de « One More » avec de beaux unissons de cuivres et de voix où l'on reconnaît les qualités d’arrangeur de Pascal Beck.

Greenstuff_boum.jpg

Sur un tempo lent, presque dub, de la guitare se greffent les cuivres à la Shaft, puis la voix, magnifique, angélique dans les aigus, avec la grâce d’un Jeff Buclley, du batteur chantant cet cette « Electric Girl », beau texte sur un magnifique fond sonore.

Greenstuff_photos.jpg

Après le tempo One-two-three-four d’usage suit «We Do The Music Live », où le trombone de Pascal Beck évoque celui de Fred Wesley, celui de James Brown.

Greenstuff_Yan.jpg

Le Funk c’est le Rock électrique noir, après le vol par les blancs du Rock’N’Roll, via le Rythm’N’Blues et la Soul Music. Le terme vient d’ailleurs d’une insulte blanche portant sur la prétendue odeur des noirs, à laquelle les blancs ajoutaient leur fantasme : mélange de musique, d’alcool, de danses en transe du vaudou de Congo Square héritées de l’Afrique, de sexe et de sueur. Dans les années 50s, Horace Silver et son « Opus De Funk », Art Blakey et Max Roach assumèrent l’idée du Jazz Hard Bop « Funky », fait par des noirs pour les noirs, réhabilitant les rythmes ancestraux du Gospel , et les publièrent sur le label Blue Note. Puis James Brown les exhorta avec son «Say ItL oud, I’m Black and I’m Proud » au Funk.

Greenstuff_Hand.jpg

Une bonne intro de claviers plus tard, les cuivres attaquent à nouveau, rappelant les Brecker Brothers dans leurs unissons.

Greenstuff_Paris.jpg

Suit « Mystic Soul » avec un bon solo d’orgue 70ies du clavier, le mysticisme et la Soul, l’Âme noire du Gospel, devenu profane avec le Blues, urbaine et populaire avec le Rythm’N’Blues et le Funk, équivalents du Rock noir et le Funk.

Greenstuff_pomme.jpg

« Stop It Now », la dernière, est un autre thème aux unissons de cuivres efficace sur clavier et guitare funkys, pour fairefaire groover une Bithday Party, avec un bon solo de trompette.

Greenstuff_Green.jpg

Le Bis apporta d’autres nuances encore, une batterie broken beat/batucada et un fender rhodes à la « In A Silent Way» de Miles Davis avec Herbie Hancock, Joe Zawinul et Chick Coréa aux claviers et John Mc Laughlin à la guitare, le premier disque « électrique » de Miles, mais un virage plutôt soft comme son nom l’indique, avant « Bitches Brew ». On retrouve dans cet « African Roads »ce groove presque immobile mais qui monte imperceptiblement vers l’intensité du trio basse/ batterie /rhodes comme dans « in A Silent Way », la guitare aux effets près de l’ampli avec la basse, le clavier/ balafon/marimba vibraphone de Roy Ayers, partisan de la fusion Jazz/Funk/Soul et les cuivres comme en un lointain écho psychédélique.

Greenstuff_Boom_Boom.jpg

Finalement, après cette introduction plutôt jam expérimentale, c’est le titre le plus africain, le plus proche de l’influence de Féla Kuti, fondateur de l’Afro Beat, aux cuivres rugissant comme un lion, chanté par le bassiste, et annonce un peu le concert de Fanga de jeudi . Bref, une longue impro 70ies magnifique, digne de Miles à l’Ile de Wight, inclassable « Call It Anything », mais ouverte à tous vents, aux horizons de tous les continents et à leurs influences.

Greenstuff_Tape.jpg

En dernier Bis, « Make Me Crazy, Electric Girl » a un côté plus Hendrixien à la « Voodoo Chile » dans la voix, les riffs et les cuivres en fond.

Greenstuff_pomme.jpg

Greenstuff devrait bientôt sortir son premier album.

Enfin, cette après-midi se terminait avec Dub In V.O., combo Lorrain samplant The Digital Garden (DJ) avec Nicolas (batterie), Julien (basse) et eP (rhodes, claviers), et ALX aux effets, qui viennent de sortir leur album « The Needle».

Dub_in_VO_Needle.jpg

En effet, ils utilisent beaucoup, dès le premier titre, de samples de films en VO sur des lignes Dub lentes, allongées, planantes, puis soudain plus rapides sur la basse et un synthé space 70ies en wah wah, aux coups de claviers et des clusts fracassants Jazz-Rock sur la drum’n’bass et le scratch des platines. Dès ce premier titre, on voit que le côté electro du Dub n’empêche pas l’énergie Live de se déployer librement.

Dub_in_Vo__Digital_Gatrden.jpg

La basse reste mélodieuse dans ses lignes, bien placée dans les espaces entre Drum & Bass, à la « Birdy Nam Nam », mais avec un son plus live.

Dub_in_Vo_basse.jpg

Les cymbales s’obstinent en Broken Beat, mais les instruments sont modifiés par les moyens électroniques en live, ce qui fait du dub, plus que de l’electro, la seule forme de musique électronique improvisée intégrant le live dans une dynamique vivante. En fait le Dub naquit en Jamaïque d’un accident, un ingénieur du son ayant oublié la voix du chanteur dans un pressage. Or cette version instru marcha mieux que les autres, car les DJ et MC pouvaient y poser leur voix.

Dub_in_Vo_drum.jpg

[Les claviers se font aquatiques, à la Edgar Froese, presque sous-marins, attirant par le fond des samples ricanants à la surface quand le rythme monte à la surface. Sur les claviers sont 80ies ou proto-hip-hop tourbillonnent des scratches en typhons, puis tout redevient mélodieux sur un saxophone free digitalisé par le laptop sur la batterie.|http://www.youtube.com/watch v=Z3O_sGFrOm4&feature=related ]

Dub_in_VO_DJ.jpg

« C’est l’heure de l’apéro » et d’une « Chanson d’Amour ».

Lee_Scratch_Perry_couronne.jpg

Cela ressemble à du Lee Scratch Perry

Bob_Marley_Upsetters.jpg

Ce père Jamaïcain du Dub, sorcier des studios, accompagna un temps Bob Marley et les Wailers avec ses Upsetters, produisit quelques-uns de leurs chefs d’œuvres, mais sortit une de leurs chansons par un de ses groupes, ce qui provoqua leur rupture quand ils l’envoyèrent à l’hôpital. Il est assez fou pour avoir par deux fois détruit volontairement son studio par le feu puis une inondation, met fin aux interviews en allumant de l’essence et en dansant la danse du feu sur la terre battue de sa maison où poussent des palmiers, arbore une barbe teinte de bleu et une couronne de montres pour rester en décallage horaire permanent, et vient, à plus de 70 ans de sortir un nouvel album «The Mighty Upsetter »!

Dub_in_VO__Logo.jpg

Mais à partir de cette technique, Dub In V.O. savent intégrer des cris féminins entre plaisir et souffrance, et même à la Asian Dub Foundation dans le clavier des influences d’harmonium portatif Pakistanais sur un sample de Nusrat ou Ustad Fateh Ali Kahn et Jan Garbarek de « Ragas & Sagas » , ce qui montre leur ouverture aux cultures du monde.

Dub_in_VO_violent.jpg

« Venez par ici tout contre moi », dit le DJ, « Viens vers moi, petit, je vais te faire du bien » surenchérit un sample de voix féminine et sensuelle, avant des accélérations de Beats de plus en plus violents.

Dub_in_VO_Live.jpg

eP, aux claviers, est celui qui improvise le plus, sur des voix à la Massive Attack dans « Side Effects », le meilleur titre au niveau de l’improvisation collective.

Dub_in_VO_band.jpg

Suit « Loov Guru », puis «Bagdad Cola », planant et avec une clameur orientale mêlée avec succès à une voix de cantatrice aigue ou hurlant de terreur dans un film série B de Russ Meyer ou au Retour horrifique du Sacre Du Tympan scratchée en tourbillons avec des tremblements de claviers et d’effets.

dub_in_VO_long_NB.jpg

Un autre titre aux influences ethniques utilise des samples de qânun syrien sur les claviers Ethio-Jazz, puis les vagues électroniques se font de plus en plus violentes.

Dub_in_VO_mur.jpg

Dans une peite mélodie électro, on croit reconnaître une phrase de Thélonious Monk, avant un dub final en bis, lent, puis samplant des diodes hurlantes.

Jean Daniel BURKHARDT