Triple-retour aux sources ce mercredi 10 juin au Café Des Anges: aux sources Rockabilly/Jump Blues 50ies, Northern Soul 60ies et Funk 70ies avec Keb Darge, Et aux sources de ce lieu, puisque No Stress y inaugura au caveau les soirées Acid Jazz ( avec entre autres cet "Expansions" de Lonnie Leston Smith) dans les années 90s, où Francky Hutchinson était parfois présent.

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Francky Hutchinson, plus Brazil, commence aux premiers jours de la fusion Jazz-Funk Brazil avec quelques titres d’ « Early Days », toujours en activité, avec des voix entre Gilberto Gil et Caetano Veloso et un scat sur les claviers.

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No Stress lui succède en ping-pong avec un de ses arrangeurs préférés, Johnny "Hammond" Smith, claviériste et organiste sur l’orgue du même nom et arrangeur et chanteur Jazz Funk aux claviers gélatineux scintillant psyché sur un lit de cordes moelleuses vintage à l’unisson.

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Le Space Funk fait hurler ses sirènes au décollage sur des cuivres et claviers stellaires, rencontrant les esprits de voix horrifiques et spatiales vers des « Visions Of Tomorrow » de Science Soul Fever (si j’ai bien lu la pochette) : ils ont une culture Funk/ Soul que je n’ai pas, tous leurs morceaux sont des perles, et je ne peux pas leur demander ce qu’ils viennent de passer après chaque titre! Dans ce domaine, ils sont mes initiateurs et mes maîtres à chacune de leurs soirées! No Stress prend le relais avec une nouveauté au goût d’acid Jazz et de Milton Banana Trio.

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Francky enchaîne avec Marius Cultier, pianiste antillais, en trio dans « Disko Machine ».

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No Stress continue avec une chanteuse Soul « Make Me Feel Like Long Time Ago », puis Francky enchaîne sur Charles Williams, puis la guitare avec voix haut perchée à la Marvin Gaye du Bluesman Roy Buchanan qui se pendit en cellule de dégrisement, dans « Can’t i Change My Mind », ma chanson préférée, la plus sautillante et bouleversante à la fois, la plus funky()en version plus lente. Keb_Darge_Roy_Buchannan.jpg



Un des anciens Anges historiques du Caveau du Café des Anges est venue en apprenant le retour de No Stress.

Arrive Keb Darge, DJ Ecossais, spécialiste du Rockabilly & Jump Blues 50ies, Northern Soul 60ies (Soul froide anglaise) et Funk 70ies. Il commence par un Twist Jazzy Funky Soulfull Swinging London à la manière de la musique d’Herbie Hancock pour « Blow Up » de Mihelangelo Antonioni, où Jane Birkin fit ses débuts au cinéma.

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Les saxos et percussions attaquent, suivis de Joseph Henry, proto-James Brown ou bon imitateur Ecossais qui était aussi mégalo que lui avec ce « Who’s The King ( You Know That’s Me) », qu'il a fait découvrir par s compilation "Kings Of Funk".

Avec sa passion pour les raretés, Keb Darge exhume des pionniers ou des suiveurs méconnus de ceux qui ont fait une grande carrière, les fait revivre. Ce qui ne l’empêche pas d’enchaîner sur l’original James Brown dans son « Papa’s Got A Brand New Bag », après un classique instru funky connu ici par le remix des Inuits que passent les Badass Funkstarz: « Hammon Groove ».

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Keb Darge aborde les années 70s par un air de Disco comme celui par lequel il remporta en 1979 une compétition de Disco à 22 ans. En tous cas, ça danse, le public hurle et sceame à sa crème comme James Brown dans les années 70s et lui-même danse encore parfois en des dance contests sauvages.

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Keb Darge sait aussi varier les plaisirs sur ces 30 ans 50ies-70ies, et est l’un des seuls DJs Funk à passer aussi du Rockabilly et du Jump Blues découverts au Cabaret de Madame Jo-Jos ( à Londres, tous les samedis) , qu’il préfère ces dernières années au Funk et à la Soul, qu’il joue depuis tant d’années, ce qui en fait le seul DJ déségrégé passant de la musique Black & White sans distinction. Pour lui « tant que le son est bon...».

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J’ajouterai d’un point de vue plus historique que le Rock’N’Roll fut volé aux Noirs par les Blancs comme le Jazz, que l’on a retrouvé des partitions de Boogie Woogie noires de 1880.

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D’ailleurs le premier Rock de la soirée sera « Let’s Boogie All Night » des Hot Rocks allemands, à la contrebasse obsédante, puis «I Got The Boogie", un Jump Blues par un Shouter à la Big Joe Turner qui chantait « Shake, Rattle & Roll » bien avant Elvis, digne des « Chicken Shack Boogie » (Boogie des boîtes poulaillers) d’Amos Milburn. Keb_gueule.jpg

Suit le torrentiel Jump Blues «Kiiiing Kooong » de Big T Tyler aux terrassant piano et saxo, que vous pourrez retrouver dans la complilation « Lost & Found Rockabilly & Jump Blues » de Keb Darge et Cut Chemist, son chauffeur de taxi .

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Le titre suivant me fait penser aux Rock’N’Roll de Boris Vian (mort il y a 50 ans) pour Henri Salvador comme « Rock-hoquet », aboyant, hoquetant, avec son saxophone hurlant et son final Be Bop, comme le Rockabilly suivant taxiphonant ses riffs obsessionnels jusqu’au solo.

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Suit Louis Prima italien de New Orleans, un des rares Jazzmen (trompettiste et chanteur) à avoir pu, comme chanteur, garder son public après la vague du Rock’N’Roll en s’y adaptant, avec son « Just A Gigolo/ I Ain’t Got Nobody » (deux standards séparés à l’origine), et finit « King Of Swingers » en ourang-outang dans le Livre De La Jungle de Walt Disney dont Louis Armstrong faisait l’ours Baloo.



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Wynonie Harris, noir et plus violent, ne parvint jamais à revenir dans les années 50s, mais chanta « Good Rockin’ Tonight » avant les blancs, dès 1948.

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Et Elvis Presley? Elvis était alors encore un fan tremblant de Rubberlegs Williams (à qui il piqua son jeu de jambes en caoutchouc, mendiant des autographes à Roy Brown , compositeur de « Good Rockin’ Tonight » qui lui écrivit ses tubes sans jamais un enregistrement ou royaltie de la part du Colonel Parker et mourut dans la misère. Une pensée pour ces héros noirs oubliés du Rock'N'Roll et Rythm'N'Blues.

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Ce qui manque peut-être à Keb Darge, c’est cette conscience historique, raciale, mais il n’en a cure, comme le public, d’ailleurs, dans leur hédonisme du son, de la joie, de l'insouciance. Je les comprends.

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Tiens le voilà, Elvis Presley, hoquetant son Rock’N’Roll, aboyant son « Hound Dog ». Non c’est en fait un de ces bons imitateurs Rockabilly récents, le mexicain Omar Romero & The Stringpoppers dans «My Baby Don’t Breathe ».

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Suit un Rockabilly à la Jerry Lee Lewis mais avec une guitare Country , puis une autre découverte récente de Keb Darge : une version de « Fever », qu’Elvis reprit après son service, mais par d'autres pseudo-Mexicains à somberos, les Londoniens Carlos & The Bandidos, en Rockabilly , embarqué sur les riffs de « Brand New Cadillac » du Rocker anglais Vince Taylor repris par les Clash dans « London Calling » ( sous le nom de Joe Struumer & The Mescaleros.

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Sans les anglais Beatles () Stones, Who ou Kinks, le Rock’n4roll serait mort de la répression américaine contre ses pionniers à la fin des années 50s.

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Pour leur défense, Elvis Presley et Johnny Halliday )après lui ont compris que le Funk était le Rock’N’Roll noir et Elvis engagea des choristes noires (dont la mère de Whitney Houston) et des cuivres, enregistrant même un album dans les studios Stax, et Johnny finit sa carrière avec un musicien de Ray Charles.

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No Stress revient avec du Reggae Funky de Third World : No That We Found Love”

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Keb Darge est aussi un pionnier de la « Northern Soul et du Deep Funk » (Funk Soul froid dont il fut un des initiateurs en Angleterre), avant Gerald Jazzman et DJ Gruyère, et passe les originaux de «Beggin’» par Frankie Vallie & The 4 Seasons qu’on connaît par Madcon, et plus tard l’original de « Tainted Love » par Gloria Jones en 1964, plus connu par Soft Cell, auvant aussi de la pub "J'Adôre", la chanson "A funky space reincarnation" de Marvin Gaye, qui était déjà un monument de sensualité spatiale par Marvin Gaye, ou une autre de téléphonie mobile.

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Dans une autre série de Rockabilly, Keb Darge passe « Stamped » des Scarlets, un Rock Psyché Garage Surf Music qui inspira le premier tube des Cramps « Bikini Girls With Machine Guns».

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En Funk, No stress répliqua par « Move On up » de Curtis Mayfield.

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Keb Darge nous renvoie à Memphis et aux années 50 avec « Luther Played The Boogie » de [Johhny Cashpour Luther Perkins, puis à une autre origine du Rock, le « Boom Boom » de John Lee Hooker, qui inspira « La Grange » des Texans ZZ Top.

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Bref, je me suis rendu compte que j’avais toujours eu honte d’écouter du Jazz devant mes amis qui écoutaient du Blues/Rock blanc 60ies/70ies, et d’avoir écouté du Rock dans les soirées Funk, alors que c’est la même musique par des blancs ou des noirs. C’est la plus belle leçon de Keb Darge, l’un des rares DJs Rock’&’Soul.

Jean Daniel BURKHARDT