Les LAST POETS à L’ILLIADE pour JAZZDOR
Par Jean Daniel BURKHARDT le vendredi, novembre 28 2008, 16:53 - HIP HOP - Lien permanent
Le mercredi 12 novembre, les Last Poets, pionniers du Hip Hop et du Rap façon Spoken- Word sur des percussions depuis 1968 pour un anniversaire de Malcolm X, découverts à la Télévision locale par Allan Douglas qui fendit la foule de Harlem les entourantpour les rencontrer et produisit leur premier album Les chanteurs, poètes et slammeurs Ummr Bi Hassan et Ablodun Ayawole étaient accompagnés de Babatunde aux congas, timbales et percussions africaines « shekere », Ronald Shannon Jackson à la batterie et Jamaaleddeene Tacuma à la basse.
Le concert d’ailleurs sous les auspices des divinités Yorubas de l’Afrique passées chez les esclaves déportés par la santeria cubaine par un solo de percussions de Babatunde, frappant à mains nues, des phalanges puis des poings ses congas et timbales puis dédiant une courte invocation au plus grand de ces Orishas, «Toques à Eleggua » qu’avait repris Omar Sosa, et slammant enfin «Le rythme coule avec les battements du cœur, l’esprit coule».
Ils nous souhaitent la « bienvenue à cette Célébration », puis entament leur concert par « Invocation », extrait de « Holy Terror », titre qui rappelle leur création en 1968 dont c’est le soixantième anniversaire cette année, dans un parc de Harlem pour l’anniversaire de Malcolm X, citent les membres fondateurs absents Felipe Luciano (responsable des textes en espagnol destinés à la communauté latino), Gylan Kain et David Nelson. Dès la première prise de parole, ils remettent les pendules à l’heure sur ce que le temps et la légende ont fait d’eux malgré eux : « Nous ne sommes pas les pères ou les grands-pères du Hip-Hop! Nous avons notre propre nom depuis plus longtemps : les Last Poets» : Derniers Poètes Afro-américains à se souvenir de l’Afrique Noire, Premiers à parler pour les cités et les ghettos noirs, contre la suprématie blanche, et riches de la mémoire de cette culture.
Umar Bin Hassan est l’auteur de «When The Revolution Comes » et «Niggers Are Scared Of Revolution » où il fustigeait la peur des noirs de la Révolution en 1969, qui étaient sur leur premier album « The Last Poets » en 1969, de «This Is Madness ».
Quoique lucides, ils sont fiers de l’Amérique qui a choisi Obama, un noir pour président et Ablodun Ayawole crie « NO MORE BUSH ! » (PLUS DE BUSH!) avec le public. : «Les Noirs se sont souciés de tous sauf d’eux-mêmes, et merci à vous de prendre soin du peuple noir en venant nous voir.»
Umar Bin Hassan scande « 40 Years » (40 ans), lentement avec Ayawole, puis de plus en plus vite, débitant l’assassinat de Malcolm X, celui de Kennedy, la Naissance des Last Poets, « 40 Years » répète Ayawole suivant son rythme, quand la plainte se fait revendication à cause des conditions de vie des noirs, d’un siècle de ségrégation entre l’abolition de l’esclavage et l’obtention des Droits Civiques. Le procédé est ancien en Afrique ou en Bretagne, et avait déjà été utilisé par Allen Ginsberg dans son poème «Howl » rythmé par les « Who » et des pupitres des étudiants lors de sa première lecture.
Oyewole prend le micro, oppose leur « Rythme » ancestral aux « Médias » des autres qu’il critique, cite un thème de Rythm’N’Blues, dénonce leur « America, Love it or Leave it » (L’Amérique, aimez-la ou quittez-la !), slogan politique déjà utilisé par la dictature Brésilienne des « années de plomb » en exilant Caetano Veloso ou Gilberto Gil, à cette différence que les noirs américains n’ont jamais eu cette possibilité de partir depuis Marcus Garvey qui a été stoppé par l’Amérique dans ce projet de retour en Afrique, et que tant qu’à faire leurs ancêtres auraient préféré y rester que d’être emmenés comme esclaves! Le Jazz parle de tout cela, Ayewole et les Last Poets n’ont fait que lui donner des mots, la parole quand « parfois un saxophone pleure » , « La victoire est la vôtre, I Belieieieieve (j’y croioiois), je prie pour cela, La Victoire est à nous » , l’émotion de sa voix pour tous ceux qui ne purent jamais s’exprimer. La chanson se termine par un solo de batterie de Ronal Shannon Jackson.
Oyewole enchaîne avec un hommage à un autre héros musical noir : le guitariste Jimi Hendrix, dans lequel on reconnaîtra dans la basse de Jaaaledeen Tacuma des extraits de ses compositions «Purple Haze» ou le plus violent «Machine Gun » enregistré sur « Band Of Gipsy » avec Buddy Miles, rythmant d’un thème à l’autre la poésie d’Oyewole et celle de Hendrix dont les textes, souvent magnifiques, en ressortent comme rendus à eux-mêmes, et finit par « embrasser le ciel » comme s’en excusait Hendrix dans "Purple Haze".
[La grandeur des Last Poets est dans cet Amour, cette Spiritualité des Sages, malgré leur Révolte.et leur Engagement Dans le Hip-Hop IAM s’était élevé jusqu’à ce niveau avec «Ombre Est Lumière». « Love & Kisses » scande Ayewoloe en souriant sur le discours plus nuancé de Bin Hassan : «Certains cherchent l’Amour, d’autres la Haine, certains le trouvent trop tard » - « The Power Of Love » intercale Ayewole. «Il y a de mauvais amours aussi : l’amour de l’argent, l’amour fou d’une femme, L’Amour est Patience » (citant St Paul aux Corinthiens 12, 4-8) « L’Amour est là pour être partagé, pour être gentil, et Je Vous Aime » -«Love is All We Need »- « S’il n’y a pas d’amour en nous, notre vie est vide.»|http://www.youtube.com/watch?v=BbQHM6oQxm8]
Merci au Last Poets d’avoir rendu un peu de l’Afrique aux deux Amériques, pour ces paroles engagées et sages, pour la force et l’espoir que nous donnent leur message positif.
Jean Daniel BURKHARDT