Jazzdor, ce sont aussi des concerts en seconde partie de soirée en « Club » qui ont pris place longtemps au TJP, l’an dernier à la Friche Laiterie, et cette année au Café Des Anges, lieu du Jazz il y a des années, tout d’abord sous le nom de Lazybird, Club tenu par le directeur de Jazzdor Philippe Ochem qui accueillit entre autres Chet Baker, puis sous les nom de Café Des Anges hébergeait « Jammez Le Mardi » et des concerts jusqu’en 1997, où ils furent remplacés par une formule salsa en-haut Funk en-bas, qui en faisait encore mon paradis musical. Il était donc émouvant de revenir en ce lieu, après deux reprises, pour écouter du Jazz.

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Le mercredi 12 novembre, on pouvait y entendre le saxophoniste alto et clarinettiste contrebasse suisse Lucien Dubuis et son trio composé de Lionel Friedli (batterie et ustensiles) et Roman Nowka extraordinaire (guitare, basse et voix). Dès la porte, le clarinettiste s’avère surpuissant avec des riffs rapides et énergiques sur une batterie bouchère Rock/Funk et une guitare folle capable de passer du Country Blues au Groove, au Funk et au Rock. Il y a un côté Morphine dans le son de groupe, l’énergie et la cohésion, mais avec la liberté du Jazz en plus. (http://www.youtube.com/watch?v=z8LC_S_pw7M )

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Suit une cavalcade effrénée à trois bille en tête cherchant à se mordre la queue sans en voir la tête, avec un batteur à la Jim Black dans la variété des frappes, mais la basse est plus libre et surprenante encore, Rock à la Chuck Berry derrière les cris de la clarinette basse. Roman Nowka arrive même à parler (d’une manière moins robotique que Peter Frampton) et scratcher avec sa basse puis repartir en boogie pour soutenir le saxo sur les ralentis de la batterie.

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Entracte (j’ai raté le début le temps d’arriver de l’Illiade et encore enn voiture grâceà Martin et au DJ local Pablo Valentino Funk/ Groove/ House qui œuvre ausoirées « Chat Groove » les jeudis (Funk, Soul, Disco) et vendredis (House, Boogie) au « Chat Perché »), qui me permet de me rapprocher pour découvrir de plus près la basse crème au bas de dobro (d’où la facilité à jouer parfois des finger pickings country) surmontée d’une main pouce levé en position de « Yeah » ou OK.

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Lucien Dubuis reprend à l’alto limite Klezmer Funky et la batterie à la cymbale surmontée d’un tambourin frétillant de toutes ses clochettes sur la basse nonchalante, dans le style d’ Aka Moon, me dit mon ami Laurent Danzo, et Lucien Dubuis s’y montre tout aussi puissant à l’alto sur les roulements de la batterie et la basse punk puis en arpèges.

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La batterie trouve des résonances inouïes dans des cloches, bols bouddhistes sur les toms et petit gong dans la bouche de Lionel Friedli, soutenant le saxo en slap tongue (faisant claquer sa langue sur l’anche) et la basse percutée à l’arrière. C’est une ballade lente, bluesy, dans les basses, puis le saxo part dans un blues de plus en plus en blues aigu, étouffé du genou, criant, avec une descente Ethiopique sur la basse jouée sur une seule corde, mais que Roman Nowka arrive à faire vibrer avec le son d’un saxo, d’un fender rhodes par des glissements sur les cordes. Entre deux roulements décalés, la batterie actionne une crécelle sur le tom, met en branle boulons et bols tibétains, trouvant une rythmique faite de bric et de broc, mieux intégrée au groupe, plus ludique que les expériences de Paul Lovens qui rend ces manipulations absurdes par son sérieux.

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Suit « Princesse de l’Espace » : « Les envahisseurs de l’espace sont déjà parmi nous mais on e va pas tout vous dire !». Peut-être ces étranges musiciens en sont-ils ? C’est une ballade aux balais et à la clarinette contrebasse sur la guitare basse. Le batteur fait rebondir une cymbale sur le tom. La guitare se fait inquiétante comme dans les musiques de David Lynch pour «Twin Peaks » ou un vieux film série B.

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On reste dans l’intersidéral avec « Ultime Cosmos » (« hommage aux Chevaliers du Zodiaque»), avec la clarinette contrebasse sur la guitare Rock (citant cortement « Still Loving You » de Scorpions) et les battements de la batterie, puis au tempo ska-punk à la Madness («One Step Beyond ») et un solo de guitare presque Hawaïen sur la baguette à plat sur le tom.

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« Voilà c’est l’heure pour les chansons d’amour, il en faut bien. Celle-là s’appelle « My first Love » » . Le batteur chante sur la guitare « in Mexico ». Les riffs de clarinette entrecoupent vocaux, guitare et batterie à voix aigue qui « stop it », puis la guitare funky au solo Rock 60ies « I said it, just when I go home ». « Après le First Love, le Dernier Love », qui commence chanté en ballade pop, et le percussionniste/batteur joue au sol de ses baguettes sur la scène comme Han Bennink.« But you will always be my first Love » avec un mélange d’innocence et d’ironie à la Velvet Underground dans « VU », un côté parodique, talk-over, parlé /chanté avec les autres en fond avec la guitare Rock Psyché 60ies.

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BIS »puisque c’est comme ça et que vous êtes sympas, on va vous jouer un morceau de Jazz », déjanté sur la guitare acide sue les percussions à terre jouant de la scène et clarinette en fond. La rythmique est drôle, ambulatoire, et soudain on reconnaît « Summertime » de Guershwin, « Giant Steps » de Coltrane dans le solo de clarinette, et le guitariste chante même en guise de viatique « You Must Take The a-Trane » à la manière émouvante et pince-sans-rire, sans effet aucun, de Marc Ribot (qui a joué avec eux) dans « La Vida Es Un Sueño» .

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Bref, une belle énergie collective ouvrant de nouvelles voies au Jazz sans dédaigner ce qu’on est en droit d’en attendre au final.

Jean Daniel BURKHARDT