Vendredi 17 octobre, le duo slovaque Longital était invité à la Salle des Fêtes de Schiltigheim. Composé de Shina Lo (basse et chant) et Daniel Salontay (chant, guitare et archet), assistés de XI DI NIM (ordinateur pris dans un hôtel pour le «troisième membre Japonais du groupe»), ils sont la sensation à Bratislava en ce moment.

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Dès les premières notes, on entend une guitare à la fois Rock et Groove et des percussions vocales féminines avant un solo de guitare wah-wah / scat sur la basse groove, qui ensuite s’approche de XI DI NIM. Daniel Salontay racle la guitare contre le pied du micro à la Hendrix.

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« C’était une chanson sur les statues qui apparaissent / disparaissent tous les cinq ans », explique Daniel Salontay en français, « Je vais acheter un piano à pédales.» Shina Lo parle également français « Et maintenant nous allons marcher pour être heureux nos pas résonnants dans le soleil rouge» (parodie d’un reliquat du glacis communiste?) pour la chanson « Uz Len Raz » (One More Time) (Encore une fois). Sur fond de bruits de pas, la voix de Shina Lo est profonde, sauvage et maîtrisée à la fois, gutturale, à la Iva Bittova, chanteuse tchèque, déjà venue dans le festival, mais en moins contemporain, ou la chanteuse du groupe Slovaque Sui Vesan, avec qui travaille également l’un des organisateurs des Nuits, Jean Etienne Moldo, et qu’on peut entendre sur « Slavomix » . La mélodie est entrecoupée de vocalises pop, suivie d’un solo trash de la guitare. La voix de Shina Lo est à la fois pure, angélique, mais on y devine les profondeurs de sauvagerie Tartare d’Attila. XI DI NIM rajoute ses beats. Daniel Salontay utilise un archet sur les cordes guitare à la manière de Jimmy Page.

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Suit « Le Miroir » : « Quand on rencontre quelqu’un qui est pour vous un miroir, parfois vous n’aimez pas ce que vous voyez mais c’est vous que vous n’aimez pas. Nous sommes votre miroir et espérons que vous aimez ce que vous voyez. », présente Daniel Salontay, -Vous êtes beaux et intelligents ! », crie quelqu’un dans le public, le rassurant tout à fait. Cette version psychologique de la caverne de Platon s’appelle «Zradlo Mirror » Sur des nappes de tuba de Xi Di Nim, les voix arrivent en écho, de l’autre côté du miroir, Un coup d’archet puis le solo hennit comme un cheval tartare lancé au galop sur la basse Rock à la Can, puis trouve des glissements festifs d’instrument à cordes, de violon, puis un solo de guitare Rock sur les beats.

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« Nous deux sommes heureux de vous présenter nos âmes et notre chat qui vient de Bordeaux», (un clavier, dont l’électricité déjà ronronne en effet de plaisir). Iva Bittova aussi imite son chat en miaulant dans une de ses chansons. Le clavier sur les beats de Xi Di Nim fait penser à de la musique de films tandis que Shina Lo chante « Sopan Zaladi », puis sur la guitare rouge et funky, rit avec la tête en arrière, ses cheveux dans l’ombre, tous deux beaux et souriants. A nouveau le clavier electro et la voix féminine, sublime, à la Massive Attack, descendant à contretemps avec un effet comique.

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[«Le moulin à vin » : ils vivent sur une colline en Autriche d’où ils voient les avions et rêvent d’éoliennes comme des moulins à vin. Daniel Salontay peut aussi jouer cool avec son archet, pas seulement dans la force du bois jusqu’à ce qu’il casse comme Jimmy Page, mais vraiment comme d’un violon, entre Didier Lockwood et les luths orientaux kamanje. Après le concert, il m’a expliqué avoir travaillé cette technique avec des luthiers, pour obtenir un doigé bloquant certaines cordes et avoir beaucoup écouté ces luths Iraniens. Elle fait les chœurs derrière lui. Soudain, le morceau prend un virage plus Rock / Funk, un solo Hard mais Funky, puis de plus lourd en restant pop. Les vocalises de Shina Lo s’envolent comme des oiseaux sur le solo de guitare wah wah, l’archet saturé utilisant le riff de « Voodoo Chile » d’Hendrix.|http://www.youtube.com/watch?v=2JdRcCB2lbo&NR=1] Longital_shina_chante.jpg

Shina Lo présente une chanson « pour les femmes courageuses de Strasbourg » : « L’effrontée » (Drzka Bold Girl : Drzka Garçon manqué), et pour cette chanson féministe, revêt un magnifique loup vénitien orangé enflammé de plumes aux paupières mauves, minaude d’une voix à la fois féline et profonde sur une guitare bluesy tourmentée comme jouée par un luth oriental à la Turgun Alimatov et les beats élastiques de l’ordi avec des voix d’hommes, des rires de boyards contre lesquelles elle semble lutter dans la tourmente.

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« Red Blue » explore encore la conscience humaine : «le coeur dit vas-y et la tête non, et entre les deux le sang est rouge ou bleu qui dit va ou non. Si rien ne marche, la croix peut-être. Essayez si vous n’avez rien d’autre à faire.» Les harmonies vocales rappellent les Polonais du warsaw Village Band puis la tête dit non : « Nay Nay Nay, proche du Nein allemand).

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Shina Lo mime le coeur qui va, l’esprit qui le stoppe et le rythme, l’intensité montent entre l’élan et ce qui l’arrête. Soudain un Break Rock Funky saturé et des vocaux plus puissants avec cette énergie électrique qui va et vient entre la guitare qui va et l’ordi que la stoppe, l’homme et la machine, la volonté /le désir et la raison /la morale avant le solo avec un slide en verre glissé sur le manche de la guitare. Longital_loin.jpg

Suit une chanson sur « La Mer », qu’ils n’ont pas en Slovaquie. L’archet sur la guitare est utilisé en pizzicato, joué dans l’aigu comme un luth piriforme mais funky, avec cette authenticité acoustique et modernité électrique du Rock à la Jean-Luc Ponty, Ses doigts sur la guitare semblent eux-mêmes des diodes électroniques vibrantes sous l’archet, dépassant Jimmy Page et la seule violence préhistorique de ses coups de boutoir découvrant l’archet sur une guitare frappés comme deux silex pour obtenir le feu du Rock.] Daniel Salontay joue vraiment de l’archet, qui l’élève à Jimi Hendrix et à un violoniste de la guitare avec des rebonds twists sur la guitare Jazzy sur les beats semblant à leur tour évoluer en fonction de lui, la guitare continuant, prolongeant le groove de l’ordi, samplant le solo d’archet. XI DI NIM est vraiment le troisième membre du groupe. La dernière chanson cite « Whole Lotta Lova Love » de Led Zeppelin avec Jimmy Page, puis arrive à des échos à la Pink Floyd dont Shina Lo joue les sirènes.

Bref, ce duo Slovaque de Bratislava a su toucher le public et faire entrer le public dans ses chansons par des introductions décalées et poétiques dans un français dont les hésitations ajoutaient leur charme. Quant à la musique, à la fois 70ies et moderne acoustique, électrique et électroniquement modifiée, elle était à la fois émouvante et moderne.

Jean Daniel BURKHARDT