Hier soir jeudi 15 octobre, Les Nuits Européennes invitait le trompettiste Norvègien Niels Peter Molvaer et le duo Tribal Groove Bumcello (Cyril Atef à la batterie et Vincent Segal au violoncelle électrique).

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Niels Petter Molvaerest, avec Erik Truffaz, l’autre grand trompettiste de la scène Jazz/Electro Européenne et depuis « Khmer », en 1997, continue sa carrière en évoluant avec différents musiciens sans perdre le fil de sa ligne musicale.

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Il était accompagné d’Audun Kleive à la batterie et à un intéressant solo de cymbale entre ses mains et d’Elvind Aarstedt à la guitare, tandis qu’un vidéaste diffusait des images de traits bleus coulant comme des stalactites se croisant, d’explosions blanches d’action painting à la Pollock sur la batterie puis des musiciens en hologrammes blancs ou verts d’eau sur fond noir.

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Comparé à Truffaz, Molvaer est davantage un chanteur qu’un joueur volcanique et intuitif, et chante d’ailleurs souvent sur scène dans le micro du pavillon de sa trompette retournée, mais aussi à travers sa trompette, s’exprime dans un style très vocalisé).

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Comme technologie annexe pour changer le son, il utilise un laptop au lieu d’effets sur l’instrument pour entourer sa musique de beats naturels et de boucles, crée un univers – écrin, un paysage ethnique presque pictural, des échos lointains où il prend place.



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La référence à Miles Davis est la plus évidente là encore, mais si Truffaz s’inspire du Miles électrique des effets de Bitches Brew et de l’Isle de Wight, Molvaer aurait plus repris le flambeau du Miles atmosphérique des ballades, de « Kind Of Blue », à la présence entêtante car se fondant dans l’espace, l’occupant entièrement, l’enveloppant de ses douceurs, ou le contaminant au point de ne plus pouvoir faire la différence entre les deux et du dernier Miles de « Doo Bop » finalement inchangé quant au son même dans un contexte Electro-Hip Hop..

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Mais on peut aussi penser pour la magie inexplicable de son lyrisme, au charme mystérieux d’un Chet Baker, mort en Hollande, plus près de chez lui que des Etats-Unis, à cette justesse de l’émotion au-delà de la volonté même de l’artiste, sublimant sa vie tourmentée, quelque chose aussi de ce qu’il appelait le « mellow of the sound » (le moelleux du son). Qui l’empêchait de faire nettoyer sa trompette pour ne pas le perdre.

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[Enfin, peut-être est-ce justement le contexte où sont nés et évoluent Truffaz et Molvaer qui les rend différents : Truffaz plus urbain, souvent presque violent, capable de pousser les aigus jusqu’au cri ou de faire de sa trompette presque une guitare électrique, Molvaer plus proche des grands espaces de sa Norvège natale, où l’on croit entendre craquer/ chanter les glaciers fondant au réchauffement climatique, les grands espaces s’étendant jusqu’à l’horizon sans fin. Truffaz serait plus militant, ayant décidé de lutter contre le monde insupportable avec les armes du Rock ou de l’Electro, Molvaer plus contemplatif, en contemplerait des beautés rêvées ou réelles, ou un monde apocalyptique encore désolé vierge, ou déjà déserté.||http://www.youtube.com/watch?v=fh7b3G4cl1U&feature=related]

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Pour reprendre une comparaison littéraire, Truffaz peint le monde tel qu’il EST, Molvaer le rêve tel qu’il DEVRAIT ÊTRE. (http://www.youtube.com/watch?v=RQYbHCLn7cE&feature=related ). On a besoin des deux, selon les moments, les instants ou les choix de nos vies.

En seconde partie, on pouvait entendre le duo Bumcello, composé de Vincent Segal (l’un des pionniers du violoncelle électrique avec son album « T Bone Garnerius », effets et samplers ) et Ciryl Atef (batterie, percussions, samplers), musiciens de M(‘atthieu Chedid).

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Ils viennent de sortir leur sixième album « Lychee Queen ».

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Ils inventent en direct un folklore urbain improvisé, "animal sophistiqué", où le violoncelle de Vincent Sègal, parfois baroque et boisé, peut aussi être utilisé comme une guitare électrique destroy aux effets Hendrixiens, est samplé, envoyé, ou stoppé, utilsé avec des effets de reverb ou de distorsion, fait la basse à cordes ou reprend son rôle d’instrument à cordes frottées, étendu jusqu’aux vièles orientales () ou à la morin khur mongole, à un cheveu de crinière de cheval, fil musical distendu, et joué jusqu’à ce qu’il casse voire sirène electronique à la Kraftwerk sur le Boléro de Ravel et Police..

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Cyril Atef a enregistré « Olympic Gramofon » avec Julien Lourau. Ses looks ethniques sont déjà une attraction, entre turban, coiffes africaines ou masque de kendo (là il était en pyjama africain et bonnet gnawa tournoyant, plutôt sobre), et il joue de la batterie, du bidon d’eau, des percussions (se mettant des clochettes sur les yeux pour ressembler à un hibou-robot et venir au devant de la scène) et sampleurs lui faisant une voix de ballon à l’hélium, lance aux public des imprécations/incantations invitant à la danse et à la libération des corps, se fait chanteur Funk Soul, marquant les temps baragouinant son groove dans « Bakin’ in The Sun », vocaux hip-hop ou chant arabisant pour « Dalila », voire africanisant.

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En Bis, Vincent Segal, qui a une autite qui le rend « sourd comme Keith Richards ou Beethoven", parle des Rolling Stones à Hyde Park et cite «Simpathy For The Devil ».

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C’était le dernier Concert de Bumcello avant plusieurs mois, chacun partant vers ses propres projets, Segal avec Bassèkou Kouyaté, Cyril Atef avec Congopunq (http://www.youtube.com/watch?v=gp8zN22vA4k), son nouveau projet, le 15 décembre au Cheval Blanc de Schiltigheim.

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Le Festival s’achève ce soir avec une grande soirée festive : La Minor (Cabaret Russe), Yom (Le Roi Du Klezmer) et le Koçani Orkestar, à la Salle Des Fêtes de Schiltigheim.

Ce soir également, le Soul Jazz Orchestra, groupe d’Afro-Beat Canadien, sera à la Salamandre à 21 h 30!

Jean Daniel BURKHARDT