En seconde partie de soirée ce même Vendredi 2 mai, le Festival de Jazz de Munster recevait le quartet New-Yorkais du saxophoniste ténor Harry Allen et du guitariste Joe Cohn.

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Joe Cohn est le fils du grand saxophoniste de la Côte Ouest Al Cohn, qui grava avec son alter ego musical Zoot Sims certaines des plus belles plages du Jazz West Coast et Cool.

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En ces années 50s où la meilleure revanche de lester « Prez » Young, le premier saxophoniste révolutionnaire contre le style viril de Coleman Hawkins, puis avait la voie à Charlie Parker, fut cette génération de jeunes ténors se réclamant de lui comme Stan Getz, qui avait connu ses premiers succès à la fin des années 40s au sein des « Four Brothers », section de saxophones du «Third Herd » de Woody Herman avec à ses côtés Zoot Sims, Herbie Steward et Serge Chaloff au baryton, qui avait eu la bonne idée pour pérenniser son emploi de jeter du haut d’un pont donnant sur un canyon où coulait une rivière les uniques exemplaires des partitions pour saxophone baryton des arrangements de l’orchestre.

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Lorsque Michel Hausser entendit le disque d’Harry Allen et Joe Cohn, il les engagea immédiatement pour son festival comme son « coup de cœur » de l’année. Lui-même n’eut jamais la chance de voir Al Cohn sur scène, qui, annoncé à un Festival de Jazz en Allemagne, fut annulé et mourut peu après.

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« Les décibels se suivent et ne ressemblent pas », annonce Hausser. La scène est dépouillée : le quartet aime à jouer à l’ancienne, acoustique, SANS AUCUN MICRO. « Hier (on y entendait du Blues électrique avec Nico Wayne Toussaint), le chapeau vous serrait peut-être un peu la tête en fin de soirée. Eh bien, aujourd’hui, il vous tombera sur les oreilles.»

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En effet, le micro est inutile car c’est la beauté de leur musique impose un silence respectueux dès qu’ Harry Allen débute par « I et A Kick Out Of You » sur un tempo à deux à l’heure, presque immobile « sans se cogner le nez dans tous les coins » comme avait commencé à le faire Lester Young et savait le faire Al Cohn sur « Them There Eyes » dans son disque en solo «On The Saxophone». Joe Cohn joue d’une de ces belles guitares à peine amplifiée dont la caisse est ornée de trous ouvragés jolis à regarder comme les anches de sa musique. Finalement, quoique jouant de la guitare, il a trouvé en Harry Allen un émule de Stan Getz pour être son Jimmy Rainey, dans cette complicité et, comme dit Alain Gerber «une feuille de papier à cigarettes ne pourrait les séparer» sur les roulements en 4/4 de croisière incessants mais discrets de la batterie et la contrebasse imperturbable entre lesquels clapote la guitare.

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Et soudain, devant cette évidence harmonique, on donnerait, pour cette pureté de l’émotion, John Coltrane, le Free Jazz et sa violence même justifiée par la ségrégation et tout ce qui s’ensuivit, le Jazz-Rock et toutes ses fusions semblent vaines et inutiles. Le Jazz n’avait pas BESOIN de ça. L’ampleur émouvante du son vous entre dans l’oreille comme du miel musical pour l’âme, les chorus qui déroulent lentement leurs volutes sonores vous enivrent.

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On se dit « Personne ne joue plus comme ça », et c’est dommage pour Lester, Stan , Al , et on est heureux des larmes d’émotion pure qui perlent à nos yeux en pensant à eux, de connaître ce secret des « happy few » à ce moment précis. Harry Allen présente les musiciens : Chuck Riggs à la batterie et Joel Forbes à la contrebasse.

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La seconde introduction est douce, presque inaudible, et l’on finit par reconnaître avec émotion «You’ve Changed» sur un tempo si lent qu’il fait venir les larmes aux yeux tandis que l’on se répète en silence les paroles de l’ultime version de Bille Holiday sur « Lady In Satin », quand le souffle qui lui restait de voix n’eût toléré d’autre écrin que des violons symphoniques, quelques choeurs et un solo de trombone langoureux réitéré. Les doux arpèges de la guitare sont vraiment le prolongement de ce saxophone au bord des lèvres, dont on entend chaque souffle entre les notes, comme chez Ben Webster.

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Harry Allen s’excuse auprès des ingénieurs du son de ce que la préférence du quartet pour le jeu acoustique le fasse se passer de leurs services.

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Mais les ballades ne font pas TOUT le répertoire du Quartet, composé également de reprises d’Al Cohn, qui savait aussi swinguer et user des tempos rapides du be-bop comme Lester Young, d’ailleurs, jammeur redoutable et invétéré (capable d’aligner 76 chorus pendant un heure et quart sur « Sweet Sue»!), et dont le premier fait d’arme fut de laminer pendant une nuit et de battre à l’usure et par son endurance l’introducteur du saxophone dans le Jazz, Coleman Hawkins, au style puissant et viril, au Cherry Blossom de Kansas City, le 18 décembre 1933! Coleman Hawkins, qui grilla de surcroît le moteur de sa cadillac en allant rejoindre Fletcher Henderson et son orchestre lui donna sa démission, préférant s’exiler en Angleterre et jouer en France avec notre Django Reinhardt national quand le bouche à oreilles des musiciens annoncerait sa première défaite.

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Fletcher engagea Lester pour le remplacer, mais il subit les moqueries des musiciens de l’orchestre ET les réveils matutinaux de son épouse Léora Henderson au son des disques de Hawkins, et aux conseils de «C’est comme ça qu’il faut jouer!» Il fut vite de retour chez Count Basie, dont il avait détesté le ténor le remplaçant entendu à la radio et écrit à celui-ci, demandant le prix du billet de train New York-Kansas City.

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Ils reprennent aussi « The Opener » d’Al Cohn, thème qui comme son nom l’indique fit souvent les ouvertures du JATP (Jazz at The Philharmonic), en particulier en 1949 où les saxophonistes Flip Phillips, Lester Young, Coleman Hawkins et Charlie Parker s’en donnèrent à cœur joie avec Roy Eldridge.

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C’est une véritable seconde voix qu’offre Joe Cohn à la guitare au saxophone d’Harry Allen dans cette «chase» (course-poursuite musicale fréquente dans les Jams, au JATP ou dans les orchestres entre deux saxophonistes qui rivalisent de virtuosité et de swing), comme Al Cohn à Zoot Sims, Jimmy Rainey à Stan Getz sur les tempos ébouriffants au Soryville, servi par cette rythmique à l’ancienne et ce saxophoniste dans la pure lignée des « Four Brothers » de Woody Herman, où Al Cohn remplaça Herbie Steward, parti chez Red Norvo aux côtés de Stan Getz, Zoot Sims et Serge Chaloff. Un autre saxophoniste, Brew Moore, était arrivé en stop sur la Côte Ouest avec Woody Guthrie, héros du Country Folk et père d’Arlo Guthrie, idole de Bob Dylan , mais qui n’aimait PAS DU TOUT le Jazz, avait inspiré un personnage à Jack Kerouac dans « Les Souterrains », et déclara ce qu’ils pensaient tous : « Quiconque ne joue pas comme Prez vit dans le pèché ! », maisse tua l’instant d’après en tombant de scène, faisant au moins une belle mort.

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Le solo de Joe Cohn flirte avec le swinguant pré-Rock sans jamais atteindre celui-ci. Harry Allen joue à la Getz sur ces tempos rapides qui firent de lui une bête de scène au swing bouillant dans ses notes tremblées avant la reprise du thème sur les grilles d’accords de la guitare, enchaîne les chorus jusqu’au solo de basse. La politesse musicale de ces gentlemen, c’est aussi de sècher ainsi nos larmes en nous faisant danser le Be-Bop sur l’énergie de thèmes plus swinguants, avec le même rapport entre les deux duettistes Cohn et Allen qu’entre Al et Zoot dans «From A To Z» et sur toute la gamme, avec la même élégance dans la ferveur et la fièvre de se courir l’un après l’autre comme le même chien après sa queue, frôlant la dissonance pour la rattraper toujours par la justesse.

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« I Concentrate On You » de Cole Porter nous fait danser encore, mais le tempo est celui de la Bossa Nova, où le lyrisme des ballades Cool et l’improvisation du Jazz moderne rencontrèrent les rythmes légèrement chaloupés de la samba cançaõ sur les compositions d’Antonio Carlos Jobim chantées par le guitariste Joao Gilberto au début des années 60s. Stan Getz fut l’un des champions de ce mariage quand, revenant de Stockholm en 1961, il trouva un Jazz Hard Bop tirant vers le free de Coltrane et Sonny Rollins, qui, s’il lui imposait techniquement le respect, n’était pas dans son tempérament musical. C’est le guitariste Charlie Byrd qui lui fit découvrir Joao Gilberto, après quoi ils enregistrèrent « Desafinado » (Slightly Out Of Tune) (défense sentimentale de la Bossa Nova de Jobim et Mendoça contre les critiques Brésiliens la jugeant trop moderne) sur leur album « Jazz Samba », qui ne plus pas à Jobim, trouvant la mélodie et l’accompagnement dénaturés.

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Mais le disque détrôna « She Loves You» des Beatles eux-mêmes des charts américains. L’année suivante, le guitariste Luiz Bonfa réunit Stan Getz et Jobim, puis ce fut l’enregistrement, à New York, de « Getz/Gilberto» avec Joao Gilberto, Stan Getz et Antonio Carlos Jobim, incluant la fameuse « Girl Of Ipanema », chantée pour le public américain en anglais par Astrud Gilberto imposée par Getz, chanson écrite par Jobim, João et le poète et diplomate Vinicius De Moraes pour la démarche d’Héloïse, une créole souriante qu’ils voyaient passer du Café Veloso à la plage de Copacabana qui s’avéra plus tard être mariée.

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Si le fait d’être réduit à la seule Bossa Nova agaçait Getz, il devait avouer que « The Girl Of Ipanema » lui permit d’envoyer ses enfants à l’université et la joua jusqu’à son dernier souffle, son dernier disque paru bien après sa mort s’intitulant « Bossas and Ballads».

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Mais la base de toute cette musique, et du Jazz en général, était le Blues, support, prétexte, tremplin ou toboggan des chases effrénées lors des Jam-Sessions. Les rares compositions de Lester Young en étaient presque toutes. Harry Allen en composa quelques-uns. Harry Allen et Joe Cohn reprirent l’un d’eux, « Chasin The Blues ». Un bon début de la basse où s’intègrent les breaks des balais de la batterie ancrant une rythmique au support efficace préludent à l’arrivée du saxophone et de la guitare toujours en embuscade dans le contre-chant à la manière de Jimmy Rainey derrière Stan Getz. Lester Young, puis Al Cohn et ses contemporains étaient capables d’arrêter le temps sur des ballades ET de « chauffer» sur des Blues à la manière des Boppeurs, qui ne rechignaient pas aux ballades. La musique avait pour vocation d’émouvoir et de faire danser le public, successivement ou simultanément, d’ailleurs, tenant lieu de divertissement à tous les sens du terme, de télé et de cinéma, de bande-son des destinées sentimentales de la jeunesse de l’Amérique puritaine de cette époque.

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Les échappées du saxophone sont contrôlées, jamais dissonantes, balisées par le fanon du phare des accords de la guitare, le gouvernail de la basse et le métronome implacable, habité de la batterie. Le solo de guitare offre une idée du Blues gai, bondissant, car il l’est parfois, dans la lignée d’un Lonnie Johnson, plus proche d’Eddie Durham pionnier de la guitare électrique, caresseur de cordes au sein des « Kansas City Five » avec Lester Young, que de Charlie Christian qui est plus connu pour son style plus agressif, avec une citation du « Dexterity » de Charlie Parker. Puis les roulements de batterie fracassants rappellent le saxophone sur le devant de la scène pour quelques échanges entre ses breaks avec la guitare, gorgés de blues et citant les « Salt Peanuts » de Gillespie au passage, Charlie Parker entre deux dentelles de cordes, se répondant dans leurs broderies aux frises parallèles, symétriques mais décalées, comme se faisant écho, dans le reflet du métal à la chaleur cuivrée.

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Une autre introduction du saxophone, lente, bluesy, ne faisant que caresser l’une des rares chansons françaises devenue un standard de Jazz aux Etats-Unis : «Les Feuilles Mortes ». A l’origine musique de ballet de Joseph Kosma de 1945 sur laquelle Jacques Prévert écrivit un texte qu’il disait « simple comme bonjour », elle fut enregistrée par Cora Vaucaire et Marianne Oswald, puis Jacques Douai en 1947. Yves Montand en reste l’interprète (quelque peu oublieux des autres) le plus connu pour sa participation au film de Prévert et Marcel Carné «Les Portes De La nuit » en 1946, film faisant naître le miracle amoureux de la rencontre de l’Île de Pâques au cœur du Paris de l’immédiat après-guerre, mais la belle Nathalie Nattier meurt à la fin. La chanson passa aux Etats-Unis avec l’adaptation en anglais «Autumn Leaves » par Johnny Mercer en 1949 (mais changeant le sens du texte et la structure en deux temps de la chanson) et Miles Davis en donna une version inoubliable sur l’album de son saxophoniste Cannonball Adderley « Somethin’Else » (Blue Note) en 1958.

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Sur la lente basse lourde (rappelant l’inquiétante introduction de Miles), le saxophone déroule les volutes vénéneuses, envoûtantes, de la mélodie, s’envole lentement sur les accords de la guitare, qui prend ensuite un solo perlé, argenté, brodé autour du thème, que le saxophone vient ensuite rappeler, l’emportant ailleurs, se colletant avec lui, comme ce chant universel qui « un jour ravirait le cœur des hommes », rêvait Jack Kerouac dans « Sur La Route ». A les entendre, on se surprend à croire encore à cette universelle harmonie, à la rêver sur leur musique. Et en effet, ils sont parmi les rares représentants des styles de Zoot Sims et Al Cohn, qui accompagnèrent Jack Kerouac lors des lectures de ces «Blues & HaÏkus» sur les restauroutes de la Route 66 et à les enregistrer en studio avec lui. On peut donc dire que l’idée du Jazz qui lui inspira ses belles pages et lui fit écrire ce magnifique Blues à la mort de Charlie Parker est assez proche de ce que nous entendons, ce qui se fait rare.

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Suit un thème d’Al Cohn, « You And Me », emblématique de sa complicité avec Zoot Sims et qui donne son titre à un de leurs albums communs, démarré ici par une batterie imparable et une basse idem, la guitare semblant là encore « souffler » la seconde voix à l’unisson du saxophone comme Al Cohn derrière Zoot Sims dans l’original, avant son solo rapide et élégant à la Rainey citant « Tea For Two » (que Lester Young avait enregistré avec Barney Kessel et le trio d’Oscar Peterson sur un disque Verve de 1952 où on l’entend fredonner comiquement mais de manière émouvante «Two To Tango» sur une fausse prise restée inédite jusqu’à la réédition en CD). Le saxophone, quant à lui, se coule dans le côté Parkerien de Getz, dont le style synthétisait le style de Lester et celui de Parker (qui devait tout à Lester à l’origine, sa première idole à Kansas City, qu’il allait écouter au Reno Club, camouflant son jeune âge sous un manteau que son père avait laissé à sa mère en les abandonnant).

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Le solo de basse sur la cymbale ronronne comme la turbine d’un moteur en marche avant un second chorus de saxophone porté par d’incessants roulements de batterie qui le renforcent entre le classicisme du tinkty-boom cher à Lester (qui n’aimait pas que les batteurs bop lâchent des bombes derrière lui pendant qu’il jouait) et la modernité annonçant la drum’n’bass du breakbeat. Le solo de batterie nous emmène jusqu’aux Caraïbes sur ses cymbales, le battement incessant du pied sur la pédale de la grosse caisse rappelant les fanfares de New Orleans où naquit le Jazz en suivant le cornettiste Buddy Bolden les jours de « Mardi-Gras » ou d’enterrement (qui étaient le Mardi-Gras du reste de l’année). Je pense aussi à Duke Ellington et son orchestre à Newport en 1956, relançant leur carrière, avec le soutien il est vrai d’une spectatrice, extatique danseuse blonde en robe de soirée décolletée qui incarna physiquement le « Crescendo in Blue » de Paul Gonsalves au saxophone et leur valut les photos et une interview dans «Life». Les phrases du saxo et de la guitare se répondent avec à-propos et vivacité, avec une justesse qui dépasse la simple compétition à mort de la «chase», car ils conquièrent de concert les échelons de la vélocité pour s’y retrouver plus que pour s’y affronter ou s’y combattre, ou à armes égales et d’un commun accord annulant la violence du choc par leur complicité musicale.

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Suit un Blues où se répondent les riffs du saxophone et les accords de la guitare, puis la basse et la batterie. Les phrases finales du saxophone rappellent celles, énormes, du «Lester Be Bop Boogie», renvoi d’ascenseur au Be Bop de Charlie Parker, mais sur un rythme Boogie Woogie à l’ancienne rappelant que Lester jouait « pas Bop, ni Cool, mais du ténor Swing », comme il l’avait rappelé à un journaliste non sans une certaine pointe d’agacement.

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Il l’enregistra en studio, puis en Live sur le disque « One Night Stand », où il partageait l’affiche avec Sarah Vaughan, le meilleur exemple de Lester sur scène en forme, plaisantant avec ses musiciens, les lançant sur des tempos casse-cous ou dans des ballades bouleversantes ou de vieilles chansons comme « Sunday », qu’il tenait d’Harry Trumbauer, saxophoniste Mélody en do de Bix Beiderbecke, sa première influence pour le saxophone.

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Après une standing ovation du public, ils nous proposent une dernière ballade en forme de viatique pour le pays des rêves. Je connais cette chanson, entends encore la voix acidulée d’une chanteuse la susurrer à mon oreille. La beauté envoûtante de la mélodie qui tourne sur elle-même me fait penser aux « Moulins de mon cœur » et autres « Lilas de Mai » de Michel Legrand par sa douceur langoureuse…

Bref, cette seconde partie,comme la première, nous a ramené au temps du JATP, de l’évidence harmonique où l’énergie musicale de la danse n’empêchait pas l’émotion des ballades mais les compensait dans la palette des émotions humaines partagées par les musiciens avec leur public.

Certes, ce Jazz était blanc, privilégié, et ces jeunes ténors gagnèrent en l’imitant plus d’argent que le pauvre Lester, qui les appelait «copy cats» n’en eût jamais sur son compte en banque. Mais on n’y pense pas sur le moment, tout au charme hypnotique de la musique…

Jean Daniel BURKHARDT