Le trompettiste Erik Truffaz, c’est un succès surprise et inattendu d’un Jazz cool à la Miles Davis (il a découvert le Jazz avec « Kind Of Blue ») flirtant parfois avec la modernité électro, drum’n’bass, le Hip Hop (avec Nyah) et le funk ou le Rock dans l'attitude et le son à la Led Zep (The walk Of The Giant Turtle) suivi depuis « The Dawn » à la fin des années 90s par le public mais avançant à chaque rencontre, projet et disque vers de nouvelles expériences tout en gardant son style. Le batteur historique Marc Erbetta a laissé sa place à Arthur Hnatek mais Marcello Giuliani est toujours à la guitare basse et Patrick Muller aux claviers.

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Erik Truffaz est une fois n’est pas coutume coiffé d’un chapeau noir ce qui lui donne un côté plus Jazz, dont il use avec l'ironie d'un sourire.

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Il joue de la trompette à l’ancienne, mais change le son par des effets sidéraux (comme Miles avant lui dans les années 70s) sur une bonne rythmique Funk, Erik Truffaz ce serait le Miles Cool des années prolongé dans le Miles électrique (alors que Miles ne voulait plus entendre parler de ces « résidus de poubelles écrits par des blancs comme "My Funny Valentine"»).

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Il commence par « Fat City », le morceau le plus rock à la « The Walk Of The Giant Turtle » ou le plus rythmé du dernier album « Doni Doni » où il part le plus dans l’aigu.

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Il continue avec « Pacheco » également du dernier album, plus cool mais sur un sol imperturbable de claviers scintillants groovys avec bons solos/ guitare basse/ batterie drum’n’bass, qui finit en Blues sur une basse à la St Germain qui terminera la soirée.

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Mais contrairement à tous les concerts où je l’ai vu (avec Ilan Ersahin ou pour Arkhangelsk la veille de l’élection annoncée de Sarkozy en 2002 « un président qui a emprunté la moitié de ses idées à Berlusconi et l’autre à Le Pen », il avait « dédié ce concert aux gens de gauche », mais ne le « referait plus aujourd’hui » m’a-t-il dit après le concert, comme Hollande, soi disant socialiste, a presque fait pareil!), il ne joue pas que le dernier album mais aussi « Less » extrait de « Bending New Corners » en 1999 (date où je le connaissais à peine et donc ne pouvais le voir en concert) sur de belles harmonies de basse polar funky et batterie drum’n’bass et trompette très aiguë à la Miles.

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Il revient à plus récent avec « El Tiempo De La Revolucion », titre éponyme de l’avant-dernier du Quartet (http://www.deezer.com/album/6000931), mariachi lent aux claviers dub enveloppants, belle progression sur la batterie et la basse naturelles qui soudain se lève sur les effets presque guitare wah wah du clavier. Il y a toujours chez Truffaz cette évidence de la rythmique et la place de la trompette dans cet écrin, comme dans Kind Of Blue : la musique est partout car se fond avec l’atmosphère universelle, intemporelle.

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Erik Truffaz invente un néo Cool 2.0 aux allures de chill-out pour le confort moelleux par la lenteur avec sourdine sur des balafons de claviers synthétiques puis pousse ses trilles sur le clavier lent. ou la batterie étouffée.

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Si Miles a adapté/ prolongé le Jazz vers le Rock et le Funk plus apprécié de la jeunesse des années 70s, Truffaz donne au Cool l’habillage électro sans la rupture stylistique que s'était imposée Miles. D'ailleurs la musique de Truffaz coule de source, entre lyrisme et modernité.

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Il reprend même « Yuri’s Choice » de « The Dawn » avec lequel je l’ai découvert, le premier titre à m’avoir touché par la montée irrésistible du piano sur le tempo drum’n’bass et le piano sautillant et la basse gardant l’authenticité jazz acoustique, réorchestré sans la voix de Nya, ce qui permet de mieux apprécier la musique.

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Comme Miles, sans danser, Truffaz utilise l’espace, jouant face au sol de la scène « Doni Doni » () sur une bonne basse funky et des claviers à la Sly Stone, mais avec aussi un côté groove Africain bambara, mais aussi dans la mélodie la basse d’« Old Devil Moon » de Chet Baker remis au goût du funk et d’un bon clavier strident façon Sun Ra ou Xénophone saturé de Bojan Z ou son dernier Boto Brazillian Quartet,album brazil mais très moderne dans ses claviers! D’après Alain Gerber dans « Chet », Chet écoutait « Tutu » de Miles Davis sur un walkman à la fin de sa vie. Chet a rêvé d'être Miles toute sa vie! Truffaz réconcilie l’émotion lyrique intemporelle de Chet et la modernité évolutive de Miles.

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Un très beau concert d’une indiscutable cohésion entre son quartet et Truffaz !

Jean Daniel BURKHARDT

Photos du Concert Patrick Lambin