Fawzy Al-Aiedy est né comme Simbad le marin à Bassora en Irak « entre deux pluies », mais fête son anniversaire le jour de son arrivée en France à Paris en 1971. Vous avez pu le croiser à Paris, Strasbourg où il vit depuis deux ans ou ailleurs, car ses concerts l’ont mené bien loin d’ici dans le monde entier, ou le voir dans le film L’autre Dumas!

« Radio Bagdad » est son nouveau disque, déjà Nominé aux Django D'Or, sorti il y a un mois, et s’il avait déjà été pionnier de la World Music avant Peter Gabriel à la fin des années 70s, est le plus moderne qu’il ait enregistré, car il y a confronté sa culture orientale classique à une rythmique très actuelle : le bassiste très groove Gilles Coquard et son frère Edouard à la batterie (plutôt musicien de flamenco) et le guitariste Baroque Romuald Ballet Baz en plus de son percussionniste égyptien habituel Adel Shams El Din aux percussions orientales.

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Fawzy a découvert la poésie arabe classique, comme française (Rimbaud) en Iraq et l’a souvent chantée dans ses précédents albums, selon la tradition la tradition orientale de poésie chantée, et elle est encore présente ici par Djaria, poème d’amour d’Abou Nawas qui ouvre l’album où il fait toutes les voix (j’ai cru à des choristes féminines, mais c’est sa voix de l’aigu au grave!) avec Jasser Haj Youssef à la viole d’amour.

Leyla est un autre poème de l’auteur préislamique Imru Al Qays (500-525) de cette histoire de Leyla & Mejnun (les Roméo et Juliette irakiens, mais lui va se consoler mystiquement dans le désert en devenant le « fou de Layla »), dans une version déjà très moderne grâce au guitariste serbe Nenad Gajin (ex No Smoking Orchestra, actuel University Of Gnawa) et l’accordéoniste David Ventitucci imprimant un rythme reggae oriental final et finit en français.

Plus électrique et moderne et surprenant encore est Blues Oriental où Fawzy chante en français le texte écrit sur son exil « entre Aladdin et Verlaine » pour lui par Claude Lemesle (parolier de Joe Dassin), charmé par la mélodie de sa chanson Fragui (également sur cet album) en huitième position. Porté par ce groove entraînant on pense presque à Khaled !

Compositeur de textes, Fawzy ne l’a jamais été autant que sur ce disque (en arabe, certes, mais traduits dans le livret). », En Irak, Fawzy a appris le cor anglais avant l’oud. Il lui en est resté un intérêt pour la musique occidental et en talent de souffleur sur ce bois qu’il utilise dans Matar, accompagné de Paul Mindy aux percussions Brésiliennes.

Grand voyageur, Fawzy a écrit Casablanca sur un rythme Gnawa Marocain pour remercier l’organisateur d’un festival de musique dans cette ville. Gilles Coquard excelle à faire groover la transe Gnawa où François Lazarevitch ajoute sa flûte.

Fragui profite du bon groove de Gilles Coquard à l’arrière du temps et de l’accordéon de Dazvid Ventitucci dans les interstices laissés à l’improvisation par la rythmique orientale. On croirait parfois entendre l’accordéon comme un harmonium pakistanais portatif dans ce contexte. Elle est finalement très différente de Blues Oriental.

Revenant au répertoire oriental mais moderne, Fawzy retrouve Madjnun et Layla dans Nassam Aleyna Al Hawa de RAhbani pour Fairuz avec un bon solo de guitare flamenco.

Inta reprend la mélodie de Blues Oriental de façon plus émouvante et dépouillée pour aborder le thème du racisme et des questions incessantes que celui qui vient d’ailleurs doit subir en France. C’est aussi pour aborder des thèmes plus actuels que Fawzy a décidé d’écrire lui-même certains de ses textes.

La poésie contemporaine est présente par Darawich (inspiré des Derviches Tourneurs) d’Edouard Tabaray sur une bonne rythmique orientale et groovy.

Fawzy évoque le désert dans Arabia mais après l’introduction vocale, François Lazarevitch lui prête des accents d’oasis celtiques grâce à ses cornemuses sur des guitares flamenco.

Le classique Irakien Dana Dina avait déjà été enregistré par Fawzy mais bénéficie d’unn arrangement plus moderne et est chanté d’une voix plus grave évoquant presque celle d’ Abed Azrié.

Enfin, ne ratez pas la dernière Gazelle au solo électrique de Nenad Gajin (qui finalement commença la musique inspiré par Jeff Beck) et le final galopant !

On l’a compris, Fawzy Al-Ayeidy ce citoyen du monde ouvre la musique à tous ses vents ! Il sera en show case gratuit à Harmonia Mundi Samedi 24 novembre à 16 h !

Jean Daniel BURKHARDT